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    Ô ma pauvre sagesse, en vain tu te dérobes
    Au fluide rôdeur, âcre et mystérieux
    Que, pour magnétiser le passant curieux,
    L’Inconnu féminin promène sous les robes !

    Les robes ! où circule et s’est insinuée
    La vie épidermique avec tous ses frissons,
    Et qui, sur les trottoirs comme entre les buissons,
    Passent avec des airs de barque et de nuée...

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    Par delà les blés noirs, les froments et les seigles,
    Loin des terrains boisés, poudreux, herbus et mous,
    Au bord d’une rivière aux écumeux remous,
    Ils songent, familiers des lézards et des aigles.

    Aspect fantomatique, inertie et stupeur,
    Jeunesse qui survit à des milliers d’années,
    Silence des cœurs morts et des âmes damnées,
    Ils ont tout ce...

  • Tenez ! fit le soulard à bonnet de coton,
    Allumant ses yeux ronds dans sa figure en poire,
    J’ai connu plus buveur que moi. Voilà l’histoire
    De celui qu’on app’lait l’maître ivrogn’ du canton :

    « Puisque ma femme est mort’, moi j’suis, dit l’pèr’ Baraille,
    Excusab’ en bonn’ vérité,...

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    Flac ! le rasoir au dos de plomb
    Vient de crouler comme une masse !
    Il est tombé net et d’aplomb :
    La tête sautille et grimace,
    Et le corps gît tout de son long.

    Sur le signe d’un monsieur blond,
    Le décapité qu’on ramasse
    Est coffré, chargé : c’est pas long !
    ...

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    Des pêchers roses, tous en chœur
    Embaument les vignes désertes ;
    Le battoir fait son bruit claqueur
    Au bord des mares découvertes,
    Et la nuit perd de sa longueur.

    Le vent qui n’a plus de rigueur
    Éparpille en souffles alertes
    La contagieuse langueur
          Des pêchers roses.

    L’Amour sourit, tendre et moqueur,
    Car bientôt, dans...

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    Dans l'air comme embrasé par une chaleur d’âtre
    Elles ont un arôme aussi lourd qu’ennuyé,
    Et par un crépuscule orageux et mouillé
    La blanche devient jaune, et la jaune, verdâtre.

    Mais à l’aube naissante, à. cette heure où la nuit
    Abandonne en pleurant les étoiles éteintes,
    Chacune se déplisse et rallume ses teintes,
    Et leur parfum s’envole...

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    Quand le soleil rit dans les coins,
    Quand le vent joue avec les foins,
    À l’époque où l’on a le moins
              D’inquiétudes ;
    Avec Mai, le mois enchanteur
    Qui donne à l’air bonne senteur,
    Il nous revient, l’oiseau chanteur
              Des solitudes.

    Il habite les endroits frais,
    Pleins de parfums et de secrets,
    Sur les...

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    C’était vers le déclin d’un jour de canicule,
    Juste dans le premier instant du crépuscule
    Que la brise engourdie attend pour s’échapper,
    L’oiseau pour se tapir, le crapaud pour ramper,
    Où la fleur se referme ainsi qu’une paupière,
    Et qui fait frémir l’arbre et chantonner la pierre.
    Seul, à pas saccadés, distraits et maladroits,
    Je traversais le...

  • De tous côtés, la ronce, effroyable broussaille,
    Grimpe férocement au long de la muraille.
    Sur un long banc de pierre, affreux comme un tombeau,
    Mélancoliquement médite un vieux corbeau.
    Un grand saule, courbé comme un homme qui souffre,
    Baigne ses cheveux verts dans un horrible gouffre
    Qui dort plein de mystère et de lents grouillements.
    L’eau clapote...

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    Tout à l’heure, sous les éclats
    Et les souffles de la tempête,
    Le saule brandillait sa tête,
    Et l’étang cognait ses bords plats.

    Avec de mortelles alarmes,
    Par ce vent, ces rumeurs, ces feux,
    L’arbre tordait ses longs cheveux
    Sur l’eau qui balayait ses larmes.

    Calme, à présent, l’étang reluit,
    Le ciel illumine la nuit,
    Et,...