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    Elle est charmante, elle est aussi brune que blonde.
    Vous la reconnaîtrez, perfide comme l’onde,
    À ses cheveux changeant de tons et de parfums.
    Lorsque cela me plaît, moi, je les trouve bruns.
    Lorsque cela me plaît, je dis : « Sa chevelure
    À les reflets d’or mat que prend la moisson mûre. »
    Elle est blonde, elle est brune, et J’ai toujours raison....

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    Bien qu’elles soient d’un marbre pâle,
    Tes mains fines que j’adorai,
    Et que jamais la dent du hâle
    N’ait pu mordre leur grain nacré ;

    Ce c’est pas à quelque statue,
    Où l’idéale pureté
    Dans la forme se perpétue,
    Que tu dérobas leur beauté.

    Et bien qu'elles forment des lignes
    Où, pour me rendre encor plus fou,
    La fantaisie a...

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    J’ai regardé longtemps tes yeux, voulant rêver.
    J"ai regardé longtemps tes yeux, voulant trouver
    Dans l’azur délicat dont leur moire est tissée
    Le rêve qui repose et berce la pensée.
    J’ai regardé tes yeux pour y chercher la paix.
    Tandis que sous le brun rideau des cils épais
    Tes yeux profonds et bleus souriaient immobiles.
    Ils rêvaient, et le...

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    Ton front est le foyer où mon âme rayonne,
    Le ciel de la pensée où palpite et frissonne
    Mon rêve, oiseau chanteur aux longues ailes d’or.
    C’est l’oreiller charmant où ma langueur s’endort,
    Où mon courage las de vivre se réveille.
    Au bout de mon chemin c’est la lueur vermeille
    Qui guide mon esprit et qui guide mes pas.
     
    L’artiste qui le...

  • La maison éclatait en fraîches voix de femme.
    On causait ; on riait son rire de vingt ans,
    Tandis qu’au bord des cieux rouges et palpitants
    Le soleil se couchait dans son grand lit de flammes.

    L’astre aux brûlants baisers allumait sur les lames
    Des prismes colorés de reflets miroitants.
    Parfois sur les reins forts des flots bleus et chantants
    Une...

  • Venise

    Nos marbres, pierres de tombeaux,
    Sont funèbres ou prosaïques.
    Les marbres roses ne sont beaux
    Que près de l'or des mosaïques.

    Le ciel levant vient se poser
    Sur leurs finesses d'aquarelles :
    On dirait qu'il donne un baiser
    À des gorges de tourterelles.

    En des accords blonds et tremblants
    Résumant la douceur des choses,...

  • A Sully Prudhomme.

    Pour faire tous les coeurs contents
    Avril revient. C'est le printemps
    Qui pleure, qui rit et barbotte,
    Et qui, chargé de falbalas,
    Nous offre ses premiers lilas
    "Fleurissez-vous ! deux sous la botte !"

    Puis, comme un rêve parfumé,
    Les petites roses de mai,
    Et les dernières violettes,
    ...

  • Du wagon sombre où rien ne bouge, où rien ne luit,
    Las des rêves, mauvais compagnons pour la nuit,
    Le voyageur, avec le jour, cherchant l'espace,
    Salue en souriant la campagne qui passe :
    Les arbres, les moissons hautes, l'azur des prés
    Lointains, sur le penchant des coteaux diaprés,
    Les villages qui sont tout proches de la route,
    Les troupeaux ruminants et...

  • Le bal allait finir. Les lustres sur les masques
    Découpaient la lumière en caprices fantasques,
    Et sur les fronts ternis montraient à vif le fard.
    L'oeil était somnambule et le rire blafard.
    La femme avait vieilli de dix ans en une heure.
    Ce n'était pas le beau plaisir qui nous effleure
    D'une aile diaprée et légère. C'était
    Le plaisir convulsif et...

  • À l'abri de l'hiver qui jetait vaguement
    Sa clameur, dans la chambre étroite et bien fermée
    Où mourait un bouquet fait de ta fleur aimée,
    Parmi les visions de l'étourdissement ;

    Pendant qu'avec la joie extrême d'un amant
    Je froissais d'un coeur las et d'une main pâmée
    L'étoffe frémissante et la chair embaumée,
    Mon sang montait plus lourd à chaque...