• L'automne fait les bruits froissés

    De nos tumultueux baisers.



    Dans l'eau tombent les feuilles sèches

    Et sur ses yeux, les folles mèches.



    Voici les pèches, les raisins,

    J'aime mieux sa joue et ses seins.



    Que me fait le soir triste et rouge,

    Quand sa lèvre boudeuse bouge ?...

  • Les coquelicots noirs et les bleuets fanés
    Dans le foin capiteux qui réjouit l'étable,
    La lettre jaunie où mon aïeul respectable
    A mon aïeule fit des serments surannés,

    La tabatière où mon grand-oncle a mis le nez,
    Le trictrac incrusté sur la petite table
    Me ravissent. Ainsi dans un temps supputable
    Mes vers vous raviront, vous qui n'êtes pas nés....

  • A Arsène Houssaye.

    Bois frissonnants, ciel étoilé,
    Mon bien-aimé s'en est allé,
    Emportant mon coeur désolé !

    Vents, que vos plaintives rumeurs,
    Que vos chants, rossignols charmeurs,
    Aillent lui dire que je meurs !

    Le premier soir qu'il vint ici
    Mon âme fut à sa merci.
    De fierté je n'eus plus souci.

    Mes regards étaient...

  • A André Gill

    Sous un roi d'Allemagne, ancien,
    Est mort Gottlieb le musicien.
    Un l'a cloué sous les planches.
    Hou ! hou ! hou !
    Le vent souffle dans les branches.

    Il est mort pour avoir aimé
    La petite Rose-de-Mai.
    Les filles ne sont pas franches.
    Hou ! hou ! hou !
    Le vent souffle dans les branches.

    Elle s'est mariée, un...

  • A Emmanuel des Essarts.

    Ce n'est pas d'hier que d'exquises poses
    Me l'ont révélée, un jour qu'en rêvant
    J'allais écouter les chansons du vent.

    Ce n'est pas d'hier que les teintes roses
    Qui passent parfois sur sa joue en fleur
    M'ont parlé matin, aurore, fraîcheur,

    Que ses clairs yeux bleus et sa chevelure
    Noire, sur la nuque et sur le...

  • J'ai rêvé l'archipel parfumé, montagneux,
    Perdu dans une mer inconnue et profonde
    Où le naufrage nous a jetés tous les deux
    Oubliés loin des lois qui régissent le monde.

    Sur le sable étendue en l'or de tes cheveux,
    Des cheveux qui te font comme une tombe blonde,
    Je te ranime au son nouveau de mes aveux
    Que ne répéteront ni la plage ni l'onde.
    ...

  • Je sens la bonne odeur des vaches dans le pré ;
    Bétail, moissons, vraiment la richesse étincelle
    Dans la plaine sans fin, sans fin, où de son aile
    La pie a des tracés noirs sur le ciel doré.

    Et puis, voici venir, belle toute à mon gré,
    La fille qui ne sait rien de ce qu'on veut d'elle
    Mais qui est la plus belle en la saison nouvelle
    Et dont le regard...

  • Dans la course effarée et sans but de ma vie
    Dédaigneux des chemins déjà frayés, trop longs,
    J'ai franchi d'âpres monts, d'insidieux vallons.
    Ma trace avant longtemps n'y sera pas suivie.

    Sur le haut des sommets que nul prudent n'envie,
    Les fins clochers, les lacs, frais miroirs, les champs blonds
    Me parlent des pays trop tôt quittés. Allons,
    Vite !...

  • Il faut écouter, amis,
    La parole des ancêtres.
    - Ne soyons jamais soumis !
    Mais, d'où viennent tous les êtres ?

    Donc pour cela, puis-je oser,
    A travers l'imaginaire,
    Vous envoyer un baiser
    De tout mon coeur, mon grand-père ?

    Vous faisiez des vers très doux
    D'après le doux Théocrite,
    " L'Oaristys ! " C'est de vous
    Qu'en faisant...

  • Sonnet

    Il y a des moments où les femmes sont fleurs ;
    On n'a pas de respect pour ces fraîches corolles...
    Je suis un papillon qui fuit des choses folles,
    Et c'est dans un baiser suprême que je meurs.

    Mais il y a parfois de mauvaises rumeurs ;
    Je t'ai baisé le bec, oiseau bleu qui t'envoles,
    J'ai bouché mon oreille aux funèbres paroles ;
    ...