• Le printemps maladif a chassé tristement
    L'hiver, saison de l'art serein, l'hiver lucide,
    Et, dans mon être à qui le sang morne préside
    L'impuissance s'étire en un long bâillement.

    Des crépuscules blancs tiédissent sous mon crâne
    Qu'un cercle de fer serre ainsi qu'un vieux tombeau
    Et triste, j'erre après un rêve vague et beau,
    Par les champs où la sève...

  • A des heures et sans que tel souffle l'émeuve
    Toute la vétusté presque couleur encens
    Comme furtive d'elle et visible je sens
    Que se dévêt pli selon pli la pierre veuve

    Flotte ou semble par soi n'apporter une preuve
    Sinon d'épandre pour baume antique le temps
    Nous immémoriaux quelques-uns si contents
    Sur la soudaineté de notre amitié neuve

    Ô...

  • La jeune dame qui marche sur la pelouse
    Devant l'été paré de pommes et d'appas,
    Quand des heures Midi comblé jette les douze,
    Dans cette plénitude arrêtant ses beaux pas,

    A dit un jour, tragique abandonnée - épouse -
    A la Mort séduisant son Poëte : "Trépas !
    Tu mens. Ô vain climat nul ! je me sais jalouse
    Du faux Éden que, triste, il n'habitera pas."...

  • Prends ce sac, Mendiant ! tu ne le cajolas
    Sénile nourrisson d'une tétine avare
    Afin de pièce à pièce en égoutter ton glas.

    Tire du métal cher quelque péché bizarre
    Et, vaste comme nous, les poings pleins, le baisons
    Souffles-y qu'il se torde ! une ardente fanfare.

    Eglise avec l'encens que toutes ces maisons
    Sur les murs quand berceur d'une bleue...

  • Le vierge, le vivace et le bel aujourd'hui
    Va-t-il nous déchirer avec un coup d'aile ivre
    Ce lac dur oublié que hante sous le givre
    Le transparent glacier des vols qui n'ont pas fui !

    Un cygne d'autrefois se souvient que c'est lui
    Magnifique mais qui sans espoir se délivre
    Pour n'avoir pas chanté la région où vivre
    Quand du stérile hiver a resplendi l'...

  • Las de l'amer repos où ma paresse offense
    Une gloire pour qui jadis j'ai fui l'enfance
    Adorable des bois de roses sous l'azur
    Naturel, et plus las sept fois du pacte dur
    De creuser par veillée une fosse nouvelle
    Dans le terrain avare et froid de ma cervelle,
    Fossoyeur sans pitié pour la stérilité,
    - Que dire à cette Aurore, ô Rêves, visité
    Par les roses...

  • Le temple enseveli divulgue par la bouche
    Sépulcrale d'égout bavant boue et rubis
    Abominablement quelque idole Anubis
    Tout le museau flambé comme un aboi farouche

    Ou que le gaz récent torde la mèche louche
    Essuyeuse on le sait des opprobres subis
    Il allume hagard un immortel pubis
    Dont le vol selon le réverbère découche

    Quel...

  • I

    (le Savetier)

    Hors de la poix rien à faire,
    Le lys naît blanc, comme odeur
    Simplement je le préfère
    A ce bon raccommodeur.

    Il va de cuir à ma paire
    Adjoindre plus que je n'eus
    Jamais, cela désespère
    Un besoin de talons nus.

    Son marteau qui ne dévie
    Fixe de clous gouailleurs
    Sur la semelle l'envie
    ...

  • D'une verrerie éphémère
    Sans fleurir la veillée amère
    Le col ignoré s'interrompt.

    Je crois bien que deux bouches n'ont
    Bu, ni son amant ni ma mère,
    Jamais à la même Chimère,
    Moi, sylphe de ce froid plafond !

    Le pur vase d'aucun breuvage
    Que l'inexhaustible veuvage
    Agonise mais ne consent,

    Naïf baiser des plus funèbres !
    A...

  • La lune s'attristait. Des séraphins en pleurs
    Rêvant, l'archet aux doigts, dans le calme des fleurs
    Vaporeuses, tiraient de mourantes violes
    De blancs sanglots glissant sur l'azur des corolles.
    - C'était le jour béni de ton premier baiser.
    Ma songerie aimant à me martyriser
    S'enivrait savamment du parfum de tristesse
    Que même sans regret et sans déboire...