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    I

    Qui ? moi ? moi de Phoebus te dicter les leçons ?
    Moi, dans l'ombre ignoré, moi, que ses nourrissons
    Pour émule aujourd'hui désavoueraient peut-être.
    Dans ce bel art des vers je n'ai point eu de maître ;
    Il n'en est point, ami. Les poëtes vantés,
    Sans cesse avec transport lus, relus, médités ;
    Les dieux, l'homme, le ciel, la nature sacrée...

  • Au moulin du bois froid où coule de l’eau claire,
           près des rochers, il y a de la fougère.

    Tout près du bois bleu, une jeune fille blonde
           lavait le linge et l’eau coulait à l’ombre.

    Et elle avait retroussé sa robe assez haut :
           on voyait ses jambes blanches dans l’eau.

    Et les chemins étaient frais, étroits, mauvais, noirs,...

  • La couronne formidable des rois
    En s’appuyant de tout son poids
    Sur un masque de cire
    Semblait broyer, dans ce hall froid,
    Tout un empire.

    Le pâle émail des yeux usés
    S’était fendu en agonies
    Minuscules, mais infinies,
    Sous les sourcils martyrisés.

    Le front avait été l’éclair,

    La couronne formidable des...

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    Un jour, — pardonnez-moi ce crime, ô grands plastiques !
    Un jour, je promenais dans le Louvre, aux Antiques,
    Mes rêves d’art intime et de modernité.
    Le Musée est très frais et très calme, en été.
    Après le Carrousel torride et son asphalte,
    Il est doux, par les jours trop chauds, d’y faire halte ;
    Car la sérénité des vieux marbres d’Hellas
    ...

  • Deux vieux marins des mers du Nord
    S’en revenaient, un soir d’automne,
    De la Sicile et de ses îles mensongères,
    Avec un peuple de Sirènes,
    À bord.

    Aigus d’orgueil, ils regagnaient leur fiord,
    Parmi les brumes mensongères,
    Aigus d’orgueil ils regagnaient le Nord
    Sous un vent morne et monotone,
    Un soir de tristesse et d’...

  •  
    Cher pays de Forez, je te dois une offrande !
    Terre où, dans mon berceau, les chênes m’ont parlé,
    Ta sève et ton murmure en ma veine ont coulé ;
    Il faut qu’un cri d’amour, aujourd’hui, te les rende.

    C’est toi qui la première, au sentier du désert,
    Fis marcher, pas à pas, mon enfance inquiète,
    Qui m’as nourri d’un miel dans les bois découvert,
    ...

  •  
    Au pays de ma reine il est un haut palais,
            Sept piliers dorés le supportent.
    Ma reine, à moi, possède un bandeau de sept perles
            Que mille et mille pierres décorent.

    Et dans le vert jardin, au pays de ma reine,
            La rose et le lis sont éclos ;
    Et parmi l’eau d’argent d’une pure fontaine
            Son beau front mire ses...

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    Quand le navire, prêt à quitter le rivage,
    A ses voiles au vent, ses matelots à bord,
    Et va s’aventurer sur l’Océan sauvage,
    Le nautonnier regarde à l’horizon d’abord.

    Il cherche si dans l’air rien n’annonce l’orage.
    Puis il fait éclater mille cris de transport
    Et, se livrant au flot — ou peut-être au naufrage,
    Salue avec la voix de ses canons...

  • Dans l’horreur et le meurtre, et la hargne et la rage,
    Allemagne, Allemagne, est-ce donc à jamais
    Qu’une bande de rois emploiera ton courage
    À préparer un crime ou parfaire un forfait ?

    Seras-tu à jamais hypocrite et brutale
    Et morne et dure, et celle, hélas, qui n’aime point ;
    Et ton immense effort dans la lutte vitale
    Ne te servira-t-il qu’à mieux...

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    O Christ ! tu livras donc à nos disputes vaines
    Ta croix même et ton sang que tu viens d’y verser !
    L arbre divin fait ombre à nos clartés humaines,
    Et notre orgueil le sape au lieu de l’embrasser.

    Pour moi, Seigneur, si fort que ma raison s’effraie,
    Je ne puis m’écarter ni douter de la croix ;
    Car j’ai fait plus que voir et que toucher ta plaie,...