• Je n'ai jamais pensé que cette voûte ronde
    Couvrît rien de constant : mais je veux désormais,
    Je veux, mon cher Morel, croire plus que jamais
    Que dessous ce grand Tout rien ferme ne se fonde,

    Puisque celui qui fut de la terre et de l'onde
    Le tonnerre et l'effroi, las de porter le faix,
    Veut d'un cloître borner la grandeur de ses faits,
    Et pour...

  • Quand je vois ces messieurs, desquels l'autorité
    Se voit ores ici commander en son rang,
    D'un front audacieux cheminer flanc à flanc,
    Il me semble de voir quelque divinité.

    Mais les voyant pâlir lorsque Sa Sainteté
    Crache dans un bassin, et d'un visage blanc
    Cautement épier s'il y a point de sang,
    Puis d'un petit souris feindre une sûreté

    O...

  • Ayant après long désir
    Pris de ma douce ennemie
    Quelques arrhes du plaisir,
    Que sa rigueur me dénie,
    Je t'offre ces beaux oeillets,
    Vénus, je t'offre ces roses,
    Dont les boutons vermeillets
    Imitent les lèvres closes
    Que j'ai baisé par trois fois,
    Marchant tout beau dessous l'ombre
    De ce buisson que tu vois
    Et n'ai su passer ce...

  • Quel est celui qui veut faire croire de soi
    Qu'il est fidèle ami, mais quand le temps se change,
    Du côté des plus forts soudainement se range,
    Et du côté de ceux qui ont le mieux de quoi ?

    Quel est celui qui dit qu'il gouverne le roi ?
    J'entends quand il se voit en un pays étrange,
    Et bien loin de la cour : quel homme est-ce, Lestrange ?
    Lestrange,...

  • J'aime la liberté, et languis en service,
    Je n'aime point la cour, et me faut courtiser,
    Je n'aime la feintise, et me faut déguiser,
    J'aime simplicité, et n'apprends que malice ;

    Je n'adore les biens, et sers à l'avarice,
    Je n'aime les honneurs, et me les faut priser,
    Je veux garder ma foi, et me la faut briser,
    Je cherche la vertu, et ne trouve que...

  • La grecque poésie orgueilleuse se vante
    Du los* qu'à son Homère Alexandre donna,
    Et les vers que César de Virgile sonna,
    La latine aujourd'hui les chante et les rechante.

    La française qui n'est tant que ces deux savante,
    Comme qui son Homère et son Virgile n'a,
    Maintient que le laurier qui François couronna
    Baste seul pour la rendre à tout jamais...

  • Ce n'est l'ambition, ni le soin d'acquérir,
    Qui m'a fait délaisser ma rive paternelle,
    Pour voir ces monts couverts d'une neige éternelle,
    Et par mille dangers ma fortune quérir.

    Le vrai honneur, qui n'est coutumier de périr,
    Et la vraye vertu, qui seule est immortelle,
    Ont comblé mes désirs d'une abondance telle,
    Qu'un plus grand bien aux dieux je ne...

  • Nouveau venu, qui cherches Rome en Rome
    Et rien de Rome en Rome n'aperçois,
    Ces vieux palais, ces vieux arcs que tu vois,
    Et ces vieux murs, c'est ce que Rome on nomme.

    Vois quel orgueil, quelle ruine : et comme
    Celle qui mit le monde sous ses lois,
    Pour dompter tout, se dompta quelquefois,
    Et devint proie au temps, qui tout consomme.

    Rome de...

  • Si la vertu, qui est de nature immortelle,
    Comme immortelles sont les semences des cieux,
    Ainsi qu'à nos esprits, se montrait à nos yeux,
    Et nos sens hébétés étaient capables d'elle,

    Non ceux-là seulement qui l'imaginent telle,
    Et ceux auxquels le vice est un monstre odieux,
    Mais on verrait encor les mêmes vicieux
    Epris de sa beauté, des beautés la...

  • Ce n'est pas sans propos qu'en vous le ciel a mis
    Tant de beautés d'esprit et de beautés de face,
    Tant de royal honneur et de royale grâce,
    Et que plus que cela vous est encor promis.

    Ce n'est pas sans propos que les destins amis,
    Pour rabaisser l'orgueil de l'espagnole audace,
    Soit par droit d'alliance ou soit par droit de race,
    Vous ont par leurs...