Les jours d'hiver quand le froid serre
Le bourg, le clos, le bois, la fange,
Poteaux de haine et de misère,
Par l'infini de la campagne,
Les mendiants ont l'air de fous.
Dans le matin, lourds de leur nuit,
Ils s'enfoncent au creux des routes,
Avec leur pain trempé de pluie
Et leur chapeau comme la suie
Et leurs grands dos comme des voûtes...
-
-
Je t'apporte, ce soir, comme offrande, ma joie
D'avoir plongé mon corps dans l'or et dans la soie
Du vent joyeux et franc et du soleil superbe ;
Mes pieds sont clairs d'avoir marché parmi les herbes,
Mes mains douces d'avoir touché le coeur des fleurs,
Mes yeux brillants d'avoir soudain senti les pleurs
Naître, sourdre et monter, autour de mes prunelles,... -
Le vieux crapaud de la nuit glauque
Vers la lune de fiel et d'or,
C'est lui, là-bas, dans les roseaux,
La morne bouche à fleur des eaux,
Qui rauque.
Là-bas, dans les roseaux,
Ces yeux immensément ouverts
Sur les minuits de l'univers,
C'est lui, dans les roseaux,
Le vieux crapaud de mes sanglots.
Quand les taches des... -
Le sol trempé se gerce aux froidures premières,
La neige blanche essaime au loin ses duvets blancs,
Et met, au bord des toits et des chaumes branlants,
Des coussinets de laine irisés de lumières.
Passent dans les champs nus les plaintes coutumières,
A travers le désert des silences dolents,
Où de grands corbeaux lourds abattent leurs vols lents
Et... -
I
Je voudrais posséder pour dire tes splendeurs,
Le plain-chant triomphal des vagues sur les sables,
Ou les poumons géants des vents intarissables ;
Je voudrais dominer les lourds échos grondeurs,
Qui jettent, dans la nuit des paroles étranges,
Pour les faire crier et clamer tes louanges ;
Je voudrais que la mer tout entière chantât,... -
Ces hommes de labour, que Greuze affadissait
Dans les molles couleurs de paysanneries,
Si proprets dans leur mise et si roses, que c'est
Motif gai de les voir, parmi les sucreries
D'un salon Louis-Quinze animer des pastels,
Les voici noirs, grossiers, bestiaux - ils sont tels.
Entre eux, ils sont parqués par villages : en somme,
Les gens des... -
Deux vieux marins des mer& du Nord
S'en revenaient, un soir d'automne,
De la Sicile et de ses îles souveraines,
Avec un peuple de Sirènes,
A bord.
Joyeux d'orgueil, ils regagnaient leur fiord,
Parmi les brumes mensongères,
Joyeux d'orgueil, ils regagnaient le Nord
Sous un vent morne et monotone,
Un soir de tristesse et d'automne.... -
Le premier arbre de l'allée ?
- Il est parti, dites, vers où,
Avec son tronc qui bouge et son feuillage fou
Et la rage du ciel à ses feuilles mêlée ?
Les autres arbres ? - L'ont suivi
Sur double rang, à l'infini ;
Ils vont là-bas, sans perdre haleine,
A sa suite, de plaine en plaine ;
Ils vont là-bas où les conduit
Sa marche à lui,... -
Ce n'est qu'un bout de sol dans l'infini du monde.
Le Nord
Y déchaîne le vent qui mord.
Ce n'est qu'un peu de terre avec sa mer au bord
Et le déroulement de sa dune inféconde.
Ce n'est qu'un bout de sol étroit,
Mais qui renferme encore et sa reine et son roi,
Et l'amour condensé d'un peuple qui les aime.
Le Nord
A beau y déchaîner le... -
La neige tombe, indiscontinûment,
Comme une lente et longue et pauvre laine,
Parmi la morne et longue et pauvre plaine,
Froide d'amour, chaude de haine.
La neige tombe, infiniment,
Comme un moment -
Monotone - dans un moment ;
La neige choit, la neige tombe,
Monotone, sur les maisons
Et les granges et leurs cloisons ;
La neige tombe et...