• Par la nuit qui s’en va et nous fait voir encore
    L’églantine qui rit sur le cœur de l’aurore ;
    Par la cloche pascale à la voix en allée
    Et qui, le Samedi-Saint, à toute volée,
    Couvre d’alleluias la bouche des vallées :
    Je vous salue, Marie.

    Par le gravissement escarpé de l’ermite
    Vers les sommets que les perdrix banches habitent,
    Par les...

  •  
    Il y a une armoire à peine luisante
    qui a entendu les voix de mes grand-tantes
    qui a entendu la voix de mon grand-père,
    qui a entendu la voix de mon père.
    À ces souvenirs l'armoire est fidèle.
    On a tort de croire qu'elle ne sait que se taire,
    car je cause avec elle.

    Il y a aussi un coucou en bois.
    Je ne sais pourquoi il n'a plus de voix...

  • Le mois de Septembre, expliquent les savants
    qui ont des bonnets carrés pour voir s’il fait du vent,
    est soumis au régime de la Balance.
    À cette époque, les bateaux sur la mer dansent
    furieusement. Les livres parlent d’équinoxe.
    J’en ai même vu un où sont des PARADOXES,
    des écliptiques, des zodiaques et des reflux
    qui expliquent la terre au moment de...

  • Si tout ceci n’est qu’un pauvre rêve, et s’il faut
    que j’ajoute, dans ma vie, une fois encore,
    la désillusion aux désillusions ;
    et, si je dois encore, par ma sombre folie,
    chercher dans la douceur du vent et de la pluie
    les seules vaines voix qui m’aient en passion :
    je ne sais si je guérirai, ô mon amie…

  • Si tu pouvais savoir toute la tristesse
    qui est au fond de mon cœur, tu la comparerais
    aux larmes d’une pauvre mère bien malade,
    à la figure usée, creuse, torturée et pâle,
    pauvre mère qui sent qu’elle va bientôt mourir
    et qui déplie pour son enfant le plus petit,
    déplie, déplie, pour le lui donner
    un jouet de treize sous, un jouet luisant, un jouet...

  • Silence. Puis une hirondelle sur un contrevent
    fait un bruit d’azur dans l’air frais et bleuissant,
    toute seule. Puis deux sabots traînassent dans la rue.
    La campagne est pâle, mais au ciel gris qui remue
    on voit déjà le bleu qui chauffera le jour.
    Je pense aux amours des vieux temps, aux amours
    de ceux qui habitaient aux parcs des beaux pays
    riches en...

  • Le soleil faisait luire l’eau du puits dans le verre.
    Les pierres de la ferme étaient cassées et vieilles,
    et les montagnes bleues avaient des lignes douces
    comme l’humidité qui luisait dans la mousse.
    La rivière était noire et les racines d’arbres
    étaient noires et tordues sur les bords qu’elle râpe.
    On fauchait au soleil où les herbes bougeaient,
    et...

  • Son souvenir emplit l’air si clair que j’ai cru
    que l’ombre d’un oiseau me tombait sur la tête.
    Le tulipier d’un parc est d’un vert noir et cru.
    Une beauté sans nom emplit l’azur, du faîte
    des pignons enfumés au plus loin horizon.
    Dans la salon où elle vint, dans le salon
    où il y avait des lilas sombres comme la nuit,
    il y a maintenant des roses dans...

  • Ta figure douce souffrait.
    Tes larmes que j’ai avalées,
    petite amie, étaient salées
    comme une herbe de marée.

    Elles m’ont mordu la langue...
    Tu t’en allais tristement
    prendre l’omnibus lourd et lent,
    en pleurant que je m’en aille ;

    et ta bouche sur ma bouche,
    ta tête faisait des sauts,
    et tu étais douce
    en pleurant doucement...

  • Tape le linge dans l’eau claire.
    Tes bras qui ont des fossettes
    sont beaux. — Tes jambes tu les serres.

    Tu es la laveuse. Tu jettes
    Dans l’eau le linge dur et sale
    des paysans aux douces têtes.

    Et puis ensuite tu l’étales
    à des ficelles dans les cours
    qui sont près de l’obscure étable.

    Les dimanches et les grands jours,
    il y a des...