• Quand le premier chantre du monde
    Expira sur les bords glacés
    Où l'Èbre effrayé, dans son onde,
    Reçut ses membres dispersés,
    Le Thrace, errant sur les montagnes,
    Remplit les bois et les campagnes
    Du cri perçant de ses douleurs ;
    Les champs de l'air en retentirent,
    Et dans les antres qui gémirent
    Le lion répandit des pleurs.

    La...

  • Nous fûmes donc au château d'If.
    C'est un lieu peu récréatif.
    Défendu par le fer oisif
    De plus d'un soldat maladif,
    Qui, de guerrier jadis actif,
    Est devenu garde passif.
    Sur ce roc taillé dans le vif,
    Par bon ordre on retient captif,
    Dans l'enceinte d'un mur massif,
    Esprit libertin, coeur rétif
    Au salutaire correctif
    D'un parent...

  • Passer ses jours à désirer,
    Sans trop savoir ce qu'on désire ;
    Au même instant rire et pleurer,
    Sans raison de pleurer et sans raison de rire ;
    Redouter le matin et le soir souhaiter
    D'avoir toujours droit de se plaindre,
    Craindre quand on doit se flatter,
    Et se flatter quand on doit craindre ;
    Adorer, haïr son tourment ;
    À la fois s'effrayer...

  • Pleurez, Grâces, pleurez, Amours ;
    Pleurez, ô vous bergers sensibles !
    Du chantre de vos moeurs paisibles
    La lyre se tait pour toujours !

    Dans la plus belle des saisons
    Renaîtront les fleurs du bocage ;
    Mais de Florian sous l'ombrage
    Ne renaîtront plus les chansons.

    Fière en secret de vos désirs,
    Si la beauté vous rend les armes,...

  • J'aime la profondeur des antiques forêts,
    La vieillesse robuste et les pompeux sommets
    Des chênes dont, sans nous, la nature et les âges
    Si haut sur notre tête ont cintré les feuillages.
    On respire en ces bois sombres, majestueux,
    Je ne sais quoi d'auguste et de religieux :
    C'est sans doute l'aspect de ces lieux de mystère,
    C'est leur profond silence et...

  • Ode

    Grâce à la muse qui m'inspire,
    Il est fini ce monument
    Que jamais ne pourront détruire
    Le fer ni le flot écumant.
    Le ciel même, armé de la foudre
    Ne saurait le réduire en poudre :
    Les siècles l'essaieraient en vain.
    Il brave ces tyrans avides,
    Plus hardi que les pyramides,
    Et plus durable que l'airain.

    Qu'atteste leur masse...

  • Aigle qui ravis les Pindares
    Jusqu'au trône enflammé des dieux,
    Enthousiasme, tu m'égares
    A travers l'abîme des cieux.
    Ce vil globe à mes yeux s'abaisse ;
    Mes yeux s'épurent, et je laisse
    Cette fange, empire des rois :
    Déjà, sous mon regard immense,
    Les astres roulent en silence,
    L'Olympe tressaille à ma voix.

    Ô muse, dans l'ombre...

  • (extrait, V)

    Ruisseau qui baignes cette plaine,
    Je te ressemble en bien des traits.
    Toujours même penchant t'entraîne :
    Le mien ne changera jamais.

    Tu fais éclore des fleurettes :
    J'en produis aussi quelquefois.
    Tu gazouilles sous ces coudrettes :
    De l'amour j'y chante les lois.

    Ton murmure flatteur et tendre
    Ne cause...

  • Au lever de l'aurore,
    Sur le lit de l'amour,
    Zéphir caressait Flore
    Plus belle qu'un beau jour.
    Une jeune bergère
    Auprès d'un noir cyprès,
    A l'écho solitaire
    Vint conter ses regrets.

    Doux oiseaux de ces rives,
    Pleurez, Tyrcis est mort ;
    Tourterelles plaintives,
    Gémissez de mon sort.
    Quittez, roses nouvelles,
    Vos...

  • Dans un nouveau parentage,
    Te souviendras-tu de moi ?
    Ah ! je te laisse pour gage
    Mon serment, mon coeur, ma foi.

    Me reviendras-tu fidelle ?
    Seras-tu toujours mon Berger ?
    Quelque destin qui m'appelle,
    Mon coeur ne saurait changer.

    Ah ! sois-moi toujours fidelle !
    Je serai toujours ton berger.