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    Le grand soleil, plongé dans un royal ennui,
    Brûle au désert des cieux. Sous les traits qu’en silence
    Il disperse et rappelle incessamment à lui,
    Le chœur grave et lointain des sphères se balance.

    Suspendu dans l’abîme il n’est ni haut ni bas ;
    Il ne prend d’aucun feu le feu qu’il communique ;
    Son regard...

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    I

    La nuit dans le désert vient à pas lents s’asseoir
    Avec sa robe d’ombre et son bandeau d’étoiles ;
    Elle rafraîchit l’air en balançant ses voiles,
    L’herbe fume et l’Asie est comme un encensoir.

    C’est l’heure du lion. Sur les brûlantes pierres,
    Et sous un jour pesant aux rayons irrités,
    Il a dormi. C’est l’heure, il ouvre les paupières,...

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    Le long du quai les grands vaisseaux,
    Que la houle incline en silence,
    Ne prennent pas garde aux berceaux
    Que la main des femmes balance.

    Mais viendra le jour des adieux ;
    Car il faut que les femmes pleurent
    Et que les hommes curieux
    Tentent les horizons qui leurrent.

    Et ce jour-là les...

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    Le meilleur moment des amours
    N’est pas quand on a dit : « Je t’aime. »
    Il est dans le silence même
    À demi rompu tous les jours ;

    Il est dans les intelligences
    Promptes et furtives des cœurs ;
    Il est dans les feintes rigueurs...

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    Newton, voyant tomber la pomme,
    Conçut la matière et ses lois :
    Oh ! surgira-t-il une fois
    Un Newton pour l’âme de l’homme ?

    Comme il est dans l’infini bleu
    Un centre où les poids se suspendent,
    Ainsi toutes les âmes tendent...

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    Parfois à mon Passé je vais dire à l’oreille :
    « Je ne suis pas heureux, parlons des premiers jours. »
    Et le dormeur couché que ma prière éveille
    Se dresse avec lenteur en frottant ses yeux lourds.

    Puis joyeux, rajustant ses printaniers atours,
    Encore un peu lassé des fêtes de la veille,
    Il vole, et me conduit de merveille en merveille
    Sous...

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    L’Humanité fragile a fait ses destinées.
    Cette race aux pieds blancs, aux tempes satinées,
    Laboure avec l’espoir d’un immense loisir,
    Plus grande sans bonheur que son Dieu sans désir.
    Cette vie éphémère, insatiable et tendre,
    Qui lui fut imposée, elle a su la défendre ;
    Et son dur créateur, l’affamant sans pitié,
    Père avare d’amour n’est père...

  • Le vase où meurt cette verveine
    D’un coup d’éventail fut fêlé ;
    Le coup dut effleurer à peine :
    Aucun bruit ne l’a révélé.

    Mais la légère meurtrissure,
    Mordant le cristal chaque jour,
    D’une marche invisible et sûre
    En a fait...

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    Les jeunes filles

    Amis, amis, nous voilà grandes ;
    Nos jours ont changé de saison.
    Allez préparer vos offrandes,
    Allez suspendre les guirlandes
    À la porte...

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    Après le départ des oiseaux,
    Les nids abandonnés pourrissent.
    Que sont devenus nos berceaux ?
    De leur bois les vers se nourrissent.

    Le mien traîne au fond des greniers,
    L’oubli morne et lent le dévore ;
    Je l’embrasserais...