• Celle que Pyrrhe et le Mars de Libye
    N'ont su dompter, cette brave cité
    Qui d'un courage au mal exercité
    Soutint le choc de la commune envie,

    Tant que sa nef par tant d'ondes ravie
    Eut contre soi tout le monde incité,
    On n'a point vu le roc d'adversité
    Rompre sa course heureusement suivie :

    Mais défaillant l'objet de sa vertu,
    Son...

  • La terre y est fertile, amples les édifices,
    Les poêles bigarrés, et les chambres de bois,
    La police immuable, immuables les lois,
    Et le peuple ennemi de forfaits et de vices.

    Ils boivent nuit et jour en Bretons et Suisses,
    Ils sont gras et refaits, et mangent plus que trois
    Voilà les compagnons et correcteurs des rois,
    Que le bon Rabelais a...

  • Si mes écrits, Ronsard, sont semés de ton los,
    Et si le mien encor tu ne dédaignes dire,
    D'être enclos en mes vers ton honneur ne désire,
    Et par là je ne cherche en tes vers être enclos.

    Laissons donc, je te prie, laissons causer ces sots,
    Et ces petits galants, qui, ne sachant que dire,
    Disent, voyant Ronsard et Bellay s'entr'écrire,
    Que ce sont...

  • Sire, celui qui est a formé toute essence
    De ce qui n'était rien. C'est l'oeuvre du Seigneur :
    Aussi tout honneur doit fléchir à son honneur,
    Et tout autre pouvoir céder à sa puissance.

    On voit beaucoup de rois, qui sont grands d'apparence :
    Mais nul, tant soit-il grand, n'aura jamais tant d'heur
    De pouvoir à la vôtre égaler sa grandeur :
    Car rien n...

  • Et puis je vis l'arbre dodonien
    Sur sept coteaux épandre son ombrage,
    Et les vainqueurs ornés de son feuillage
    Dessus le bord du fleuve ausonien.

    Là fut dressé maint trophée ancien,
    Mainte dépouille, et maint beau témoignage
    De la grandeur de ce brave lignage
    Qui descendit du sang dardanien.

    J'étais ravi de voir chose si rare,
    Quand de...

  • Tu ne crains la fureur de ma plume animée,
    Pensant que je n'ai rien à dire contre toi,
    Sinon ce que ta rage a vomi contre moi,
    Grinçant comme un mâtin la dent envenimée.

    Tu crois que je n'en sais que par la renommée,
    Et que quand j'aurai dit que tu n'as point de foi,
    Que tu es affronteur, que tu es traître au roi,
    Que j'aurai contre toi ma force...

  • Voyant l'ambition, l'envie, et l'avarice,
    La rancune, l'orgueil, le désir aveuglé,
    Dont cet âge de fer de vices tout rouillé
    A violé l'honneur de l'antique justice :

    Voyant d'une autre part la fraude, la malice,
    Le procès immortel, le droit mal conseillé :
    Et voyant au milieu du vice déréglé
    Cette royale fleur, qui ne tient rien du vice :

    ...

  • Non pour ce qu'un grand roi ait été votre père,
    Non pour votre degré et royale hauteur,
    Chacun de votre nom veut être le chanteur,
    Ni pour ce qu'un grand roi soit ores votre frère.

    La nature, qui est de tous commune mère,
    Vous fit naître, Madame, avecques ce grand heur,
    Et ce qui accompagne une telle grandeur,
    Ce sont souvent des dons de fortune...

  • Ô trois et quatre fois malheureuse la terre
    Dont le prince ne voit que par les yeux d'autrui,
    N'entend que par ceux-là qui répondent pour lui,
    Aveugle, sourd et muet plus que n'est une pierre !

    Tels sont ceux-là, Seigneur, qu'aujourd'hui l'on resserre
    Oisifs dedans leur chambre, ainsi qu'en un étui,
    Pour durer plus longtemps, et ne sentir l'ennui
    Que...

  • Depuis que j'ai laissé mon naturel séjour
    Pour venir où le Tibre aux flots tortus ondoie,
    Le ciel a vu trois fois par son oblique voie
    Recommencer son cours la grand lampe du jour.

    Mais j'ai si grand désir de me voir de retour
    Que ces trois ans me sont plus qu'un siège de Troie,
    Tant me tarde, Morel, que Paris je revoie,
    Et tant le ciel pour moi fait...