• La Mort a bu du sang
    Au cabaret des Trois Cercueils.

    La Mort a mis sur le comptoir
    Un écu noir,
    « C’est pour les cierges et pour les deuils. »

    Des gens s’en sont allés
    Tout lentement
    Chercher le sacrement.

    On a vu cheminer le prêtre

    La Mort a bu du sang
    Au cabaret des Trois Cercueils.

    La Mort a mis...

  • Avec ses doux yeux bleus

    Pâlis
    Aux vastes feux des cieux,
    La fleur de lin regarde, en leurs méandres,
    Couler l’Escaut ou s’attarder la Lys.
    La fleur de lin est fleur de Flandre.

    On l’aime au pays clair
    Où les moulins tournent dans l’air
    Ainsi que des étoiles ;
    Où les bateaux larges et bas
    Passent...

  • Paré d’aigue-marine et d’onyx et d’opale,
    Le soir voluptueux sourit bizarrement,
    Et, goûtant à demi la saveur du moment,
    Nous regrettons tout bas une joie idéale.

    Le couchant qui blêmit et rougit tour à tour,
    La campagne morbide et l’heure...

  • Ton œil ne peut saisir les fleurs que tu fais naître
    Quand tu daignes fouler le sol ;
    Il faut avoir mon cœur, vois-tu, pour les connaître
    Il faut t’aimer d’un...

  • En ces heures de jeune et bel avril dardé,
    L’hiver, à tout jamais, semble barricadé
    Là-bas, au nord, derrière un mur géant de glace.
    Des souffles doux à de longs vols d’oiseaux s’enlacent
    Et visitent les champs, les bois et les vergers.
    Les abricotiers clairs et les pêchers légers
    Se décorent de fleurs blanches, roses, vermeilles
    Pour leurs noces avec...

  • Ce sont quelques fleurs des prés
    Dont je fleuris votre couche
    Et que vous parfumerez
    En y posant votre bouche.

    Des coquelicots ardents,
    Des nielles et des brizes,
    Fragiles fleurs du printemps
    Qui tremblent aux moindres brises.

    Des sauges, des boutons d’or
    Avec de l’avoine folle,
    ...

  •  
    À Joseph Rouleau.

    La débâcle a grossi l’Etchemin, qui naguères
    Sous la glace tordait ses ondes prisonnières,
    Et, le canthook aux bras, les flotteurs fiers et forts
    Drayent les lourds billots échoués sur ses bords,
    Ou sur les rocs trouant au large l’eau glacée,
    Font glisser sur les flots la forêt terrassée
    Par le fer des...

  • Foi

     
    Voici s’endormir les heures brèves
    Qui frissonnent de froid et de peur.
    La meute invisible de nos rêves
    Poursuit la lune dont la lueur
    Emeut l’âme de l’eau sur les grèves
    Et fait crier l’amour dans mon cœur.

    Je me trouve au tournant de la route,
    Les yeux cherchant ce qu’on ne voit pas,
    Les mains folles comme lorsqu’on doute,
    Les...

  • LA FORÊT

    La forêt est un monde et sa vie est la mienne.

    D’aussi loin qu’il me souvienne,
    Sa présence me fut un magnifique émoi ;
    Tout jeune encor, quand je m’en fus vers elle,
    Je sentis pénétrer sa rumeur éternelle
    Obscurément, au fond de moi.

    J’en avais crainte et joie et j’aimais le mystère...

  •  
    Sous un abri grossier que le charbon enfume,
    Dans un recoin rougi d’une chaude lueur,
    La manche retroussée et le front en sueur,
    Le vaillant forgeron frappe sur son enclume.

    Comme le fer qu’il bat, solide est son grand cœur
    Que n’amollit jamais la peur ou l’amertume.
    Devant l’objet qui naît de son effort vainqueur,
    Au feu de la fierté souvent...