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    Dans les blés mûrs, un soir de fête,
    La jeune fille me cueillit ;
    Dans ses cheveux noirs, sur sa tête.
    Ma blanche étoile rejaillit.
    Fleur domestique et familière,
    Je m’y collais, comme le lierre
    Se colle au front du dahlia ;
    Sa joue en fut tout embellie ;
    Puis j’en tombai froide et pâlie :
    Son pied distrait me balaya.

    Mais le...

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    TOUSSAINT.

                                          Avancez,
    Mes enfants, mes amis, frères d’ignominie !
    Vous que hait la nature et que l’homme renie ;
    A qui le lait d’un sein par les chaînes meurtri
    N’a fait qu’un cœur de fiel dans un corps amaigri ;
    Vous, semblables en tout à ce qui fait la bête ;
    Reptiles, dont je suis et la main et la tête !...

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    I

    O harpe qui dors sur la tête
    Immense du poëte-roi,
    Veuve immortelle du prophète,
    Un jour encore éveille-toi !
    Quoi ! dans cette innombrable foule
    Des races dont le pied te foule,
    Il n’est plus une seule main
    Qui te remue et qui t’accorde,
    Et qui puisse un jour sur ta corde
    Faire éclater l’esprit humain ?

    Es-tu comme...

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    Quand la lune est au ciel comme l’astre des rêves,
    Que la mer balbutie en dormant sur ses grèves,
    Que des voiles sans bruit glissent le long du bord,
    Que l’aboiement des chiens s’affaiblit et s’endort,
    Et que, sur les flancs noirs des montagnes voilées,
    L’une après l’autre on voit les lampes étoilées
    S’éteindre au souffle humain de maison en maison...

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    Quand ils se rencontraient sur la vague ou la grève,
    En souvenir vivant d’un antique départ,
    Nos pères se montraient les deux moitiés d’un glaive
    Dont chacun d’eux gardait la symbolique part :
    « Frère ! se disaient-ils, reconnais-tu la lame ?
    Est-ce bien là l’éclair, l’eau, la trempe et le fil ?
    Et l’acier qu’a fondu le même jet de flamme
    Fibre...

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    Enfant des mers, ne vois-tu rien là-bas ?

    Frère ! ce que je vois, oserai-je le dire ?
    Pour notre âge avancé, raisonner c’est prédire
    Il ne faut pas gravir un foudroyant sommet,
    Voir sécher ou fleurir la verge du prophète,
    Des cornes du bélier diviniser sa tête,
    Ni passer sur la flamme au vent de la tempête
    Le pont d’...

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    Toi, dont le siècle encore agite la mémoire,
    Pourquoi dors-tu si loin de ton lac, ô Rousseau ?
    Un abîme de bruit, de malheur et de gloire,
    Devait-il séparer ta tombe et ton berceau ?

    De ce frais Ermitage aux coteaux des Charmettes,
    Par quels rudes sentiers ton destin t'a conduit !
    Hélas ! la terre ainsi traîne tous ses poètes
    De leur berceau...