• Vous m'aviez dit que vous m'aimiez bien fort,
    Bien fort, bien fort, et ainsi je l'ai cru,
    Mais tôt après vous fîtes votre effort
    D'en dire autant en un lieu que j'ai vu :
    Bien fort, bien fort, vous l'aimez, je l'ai su.
    Il vous faut trop de forces pour deux lieux
    Si fort aimer, mais prenez pour le mieux
    Deux bons ciseaux coupent notre amitié,
    Et...

  • pour Hélène de Tournon

    Si ceux à qui devez, comme vous dites,
    Vous connaissaient comme je vous connais,
    Quitte seriez des dettes que vous fîtes,
    Le temps passé, tant grandes que petites,
    En leur payant un dizain toutefois
    Tel que le vôtre qui vaut mieux mille fois
    Que l'argent dû par vous, en conscience ;
    Car estimer on peut l'argent au...

  • étant dans sa litière durant la maladie du roi


    Si la douleur de mon esprit
    Je pouvais montrer par parole
    Ou la déclarer par écrit,
    Oncques ne fut si triste rôle ;
    Car le mal qui plus fort m'affole
    Je le cache et couvre plus fort ;
    Pourquoi n'ai rien qui me console,
    Fors l'espoir de la douce mort.

    Je sais que je ne dois celer...

  • Las ! tant malheureuse je suis,
    Que mon malheur dire ne puis,
    Sinon qu'il est sans espérance :
    Désespoir est déjà à l'huis
    Pour me jeter au fond du puits
    Où n'a d'en saillir apparence.

    Tant de larmes jettent mes yeux
    Qu'ils ne voient terre ni cieux,
    Telle est de leur pleur abondance.
    Ma bouche se plaint en tous lieux,
    De mon coeur...

  • Ô prompt à croire et tardif à savoir
    Le vrai, qui tant clairement se peut voir,
    A votre coeur reçu telle pensée
    Qu'à tout jamais j'en demeure offensée ?
    Est-il entré dans votre entendement,
    Que dans mon coeur y ait un autre amant ?
    Hélas ! mon Dieu, avez-vous bien pu croire
    Qu'autre que vous puisse être en ma mémoire ?
    Est-il possible ? A...

  • Je n'ai plus ni père, ni mère,
    Ni soeur, ni frère
    Sinon Dieu seul auquel j'espère,
    Qui sur le ciel et terre impère ;
    Là-haut, là-bas,
    Tout par compas ;
    Compère, commère,
    Voici vie prospère.

    Je suis amoureux non en ville,
    Ni en maison, ni en château,
    Ce n'est de femme ni de fille
    Mais du seul bon, puissant et beau :
    C'est...

  • Rondeau

    Mon seul Sauveur, que vous pourrais-je dire ?
    Vous connaissez tout ce que je désire ;
    Rien n'est caché devant votre savoir ;
    Le plus profond du coeur vous pouvez voir
    Par quoi à vous seulement je soupire.

    Je n'ai espoir en roi, roc ni empire ;
    Si non en vous ; le demeurant m'empire ;
    Car je vous tiens Dieu ayant tout pouvoir,...

  • Adieu l'object qui feist premierement
    Tourner sur luy la force de mes yeulx,
    Le doulx maintien, l'honneste acoustrement,
    Armé, vestu en tous jeux et tous lieux,
    Tant que nul oeil ne se peult loger mieulx
    Qu'a faict le mien. Adieu la bonne audace :
    Si vous n'estiez si couvert vicieux,
    Je ne vey oncq une meilleure grace.

    Adieu vous dy, le regard...

  • Un ami vif vint à la dame morte,
    Et par prière il la cuida tenter
    De le vouloir aimer de même sorte,
    Puis la pressa juqu'à la tourmenter ;
    Mais mot ne dit, donc, pour se contenter,
    Il essaya de l'embrasser au corps.
    Contrainte fut la Dame dire alors :
    " Je vous requiers, ô Ami importun,
    Laissez les morts ensevelir les morts,
    Car morte suis pour tous...

  • Si Dieu m'a Christ pour chef donné,
    Faut-il que je serve autre maître ?
    S'il m'a le pain vif ordonné,
    Faut-il du pain de mort repaître ?
    S'il me veut sauver par sa dextre,
    Faut-il en mon bras me fier ?
    S'il est mon salut et mon être,
    Point n'en faut d'autre édifier.
    S'il est mon seul et sûr espoir,
    Faut-il avoir autre espérance ?
    S'il...