• L'immobile beauté
    Des soirs d'été,
    Sur les gazons où ils s'éploient,
    Nous offre le symbole
    Sans geste vain, ni sans parole,
    Du repos dans la joie.

    Le matin jeune et ses surprises
    S'en sont allés, avec les brises ;
    Midi lui-même et les pans de velours
    De ses vents chauds, de ses vents lourds
    Ne tombe plus sur la plaine torride ;
    Et...

  • L'absurdité grandit comme une fleur fatale
    Dans le terreau des sens, des coeurs et des cerveaux ;
    En vain tonnent, là-bas, les prodiges nouveaux ;
    Nous, nous restons croupir dans la raison natale.

    Je veux marcher vers la folie et ses soleils,
    Ses blancs soleils de lune au grand midi, bizarres,
    Et ses échos lointains, mordus de tintamarres
    Et d'...

  • Dites, les gens, les vieilles gens,
    Que s'exaltent les coeurs dans vos hameaux ;
    Dites, les gens, les vieilles gens,
    Que la clarté s'éveille en vos carreaux
    Qui regardent la route,
    Car les mages avec leurs blancs manteaux,
    Car les bergers avec leurs blancs troupeaux,
    Sont là qui débouchent et qui écoutent
    Et qui s'avancent sur la route.
    ...

  • Une place minime et quelques rues,
    Avec un Christ au carrefour ;
    Et l'Escaut gris et puis la tour
    Qui se mire, parmi les eaux bourrues ;
    Et le quartier du Dam, misérable et lépreux,
    Jeté comme au hasard vers les prairies ;
    Et près du cimetière aux buis nombreux,
    La chapelle vouée à la Vierge Marie,
    Par un marin qui s'en revint
    On ne sait quand...

  • Se replier toujours sur soi-même, si morne !
    Comme un drap lourd, qu'aucun dessin de fleur n'adorne.

    Se replier, s'appesantir et se tasser
    Et se toujours, en angles noirs et mats, casser.

    Si morne ! et se toujours interdire l'envie
    De tailler en drapeaux l'étoffe de sa vie.

    Tapir entre les plis ses mauvaises fureurs
    Et ses rancoeurs et ses...

  • (II)

    Sous les vitres du hall nitreux que le froid fore
    Et vrille et que de mats brouillards baignent de vair,
    Un soir, en tout à coup de gel, s'ouvre l'hiver,
    Dans le foyer, fourbi de naphte et de phosphore

    Qui brûle : et le charbon pointu se mousse d'or
    Et le posthume été dans l'or se réitère ;
    Il émeraude un bol, il enturquoise un verre...

  • Comme un troupeau de boeufs aveugles,
    Avec effarement, là-bas, au fond des soirs,
    L'ouragan beugle.

    Et tout à coup, par au-dessus des pignons noirs,
    Que dresse, autour de lui, l'église, au crépuscule,
    Rayé d'éclairs, le clocher brûle.

    Le vieux sonneur, la tête folle,
    La bouche ouverte et sans parole,
    Accourt ;
    Et le tocsin qu'il frappe,...

  • Brisez-leur pattes et vertèbres,
    Chassez les rats, les rats.
    Et puis versez du froment noir,
    Le soir,
    Dans les ténèbres.

    Jadis, lorsque mon coeur cassa,
    Une femme le ramassa
    Pour le donner aux rats.

    - Brisez-leur pattes et vertèbres.

    Souvent je les ai vus dans l'âtre,
    Taches d'encre parmi le plâtre,
    Qui grignotaient ma...

  • Lassé des mots, lassé des livres,
    Qui tiédissent la volonté,
    Je cherche, au fond de ma fierté,
    L'acte qui sauve et qui délivre.

    La vie, elle est là-bas, violente et féconde,
    Qui mord, à galops fous, les grands chemins du monde.
    Dans le tumulte et la poussière,
    Les forts se sont pendus à sa crinière
    Et, soulevés par elle et par ses bonds,
    De...

  • Quoique nous le voyions fleurir devant nos yeux
    Ce jardin clair où nous passons silencieux,
    C'est plus encor en nous que se féconde
    Le plus candide et doux jardin du monde.

    Car nous vivons toutes les fleurs,
    Toutes les herbes, toutes les palmes
    En nos rires et en nos pleurs
    De bonheur pur et calme.

    Car nous vivons toute la joie
    Dardée...