• Sitôt que le soleil dans le matin luisait,
    Comme un éclat vermeil sur un saphir immense,
    Que dans l'air les oiseaux détaillaient leur romance,
    Lu ferme tout entière au travail surgissait.

    Un va-et-vient, mêlé d'appels hâtifs bruissait,
    Et les bêtes de cour, en farfouille, en démence,
    Courant, sautant, volant, mêlaient d'accoutumance,
    Leurs cris et...

  • C'est une troupe de gamins
    Qui porte la virevoltante étoile
    De toile
    Au bout d'un bâton vain.

    Le vieux maître d'école
    Leur a donné congé ;
    L'hiver est blanc, la neige vole,
    Le bord du toit en est frangé.

    Et par les cours, et par les rues,
    Et deux par deux et trois par trois,
    Ils vont chantant avec des voix
    Qui muent,...

  • L'ombre s'installe, avec brutalité ;
    Mais les ciseaux de la lumière,
    Au long des quais, coupent l'obscurité,
    A coups menus, de réverbère en réverbère.

    La gare immense et ses vitraux larges et droits
    Brillent, comme une châsse, en la nuit sourde,
    Tandis que des voiles de suie et d'ombre lourde
    Choient sur les murs trapus et les hautains beffrois....

  • Autant que moi malade et veule, as-tu goûté
    Quand ton être ployait sous les fièvres brandies,
    Quand tu mâchais l'orviétan des maladies,
    Le coupable conseil de l'inutilité ?

    Et doux soleil qui baise un oeil éteint d'aveugle ?
    Et fleur venue au tard décembral de l'hiver ?
    Et plume d'oiselet soufflée au vent de fer ?
    Et neutre et vide écho vers la taure...

  • A Léon Cladel.

    Le mouchoir sur la nuque et la jupe lâchée,
    Dès l'aube, elle est venue au pacage, de loin ;
    Mais sommeillante encore, elle s'est recouchée,
    Là sous les arbres, dans un coin.

    Aussitôt elle dort, bouche ouverte et ronflante ;
    Le gazon monte, autour du front et des pieds nus ;
    Les bras sont repliés de façon nonchalante,
    Et...

  • Comme des mains
    Coupées,
    Les feuilles choient sur les chemins,
    Les prés et les cépées.

    La vieille au mantelet de cotonnade,
    Capuchon bas jusqu'au menton,
    A sauts menus, sur un bâton,
    Trimballe aux champs sa promenade.

    Taupes, souris, mulots et rats
    Trottent et radotent après ses pas.
    Les troncs et les taillis se parlent ;
    ...

  • Les barques d'or du bel été
    Qui partirent, folles d'espace,
    S'en reviennent mornes et lasses
    Des horizons ensanglantés.

    A coups de rames monotones,
    Elles s'avancent sur les eaux ;
    On les prendrait pour des berceaux
    Où dormiraient des fleurs d'automne.

    Tiges de lys au beau front d'or,
    Toutes vous gisez abattues ;
    Seules, les...

  • Comme des clous, les gros pavés
    Fixent au sol les routes claires :
    Lignes et courbes de lumière
    Qui décorent et divisent les terres
    En ce pays de bois et de champs emblavés.

    Les plus vieilles se souviennent du temps de Rome,
    Quand s'en venaient les Dieux
    Rôder dans les vergers des hommes
    D'autres ont aperçu la fée au manteau bleu
    Qui...

  • Un vent rude soufflait par les azurs cendrés,
    Quand du côté de l'aube, ouverte à l'avalanche,
    L'horizon s'ébranla dans une charge blanche
    Et dans un galop fou de nuages cabrés.

    Le jour entier, jour clair, jour sans pluie et sans brume,
    Les crins sautants, les flancs dorés, la croupe en feu,
    Ils ruèrent leur course à travers l'éther bleu,
    Dans un...

  • Avec les doigts de ma torture
    Gratteurs de mauvaise écriture,
    Maniaque inspecteur de maux,
    J'écris encor des mots, des mots...

    Quant à mon âme, elle est partie.

    Morosement et pour extraire
    L'arrière-faix de ma colère,
    Aigu d'orgueil, crispé d'effort,
    Je râcle en vain mon cerveau mort.

    Quant à mon âme, elle est partie.
    ...