• La caravane humaine au Sahara du monde,
    Par ce chemin des ans qui n'a pas de retour,
    S'en va traînant le pied, brûlée aux feux du jour,
    Et buvant sur ses bras la sueur qui l'inonde.

    Le grand lion rugit et la tempête gronde ;
    A l'horizon fuyard, ni minaret, ni tour ;
    La seule ombre qu'on ait, c'est l'ombre du vautour,
    Qui traverse le ciel cherchant sa...

  • Sur les tuiles où se hasarde
    Le chat guettant l'oiseau qui boit,
    De mon balcon une mansarde
    Entre deux tuyaux s'aperçoit.

    Pour la parer d'un faux bien-être,
    Si je mentais comme un auteur,
    Je pourrais faire à sa fenêtre
    Un cadre de pois de senteur,

    Et vous y montrer Rigolette
    Riant à son petit miroir,
    Dont le tain rayé ne reflète...

  • On ne voit en passant par les Landes désertes,
    Vrai Sahara français, poudré de sable blanc,
    Surgir de l'herbe sèche et des flaques d'eaux vertes
    D'autre arbre que le pin avec sa plaie au flanc,

    Car, pour lui dérober ses larmes de résine,
    L'homme, avare bourreau de la création,
    Qui ne vit qu'aux dépens de ceux qu'il assassine,
    Dans son tronc...

  • Au mois d'avril, la terre est rose,
    Comme la jeunesse et l'amour ;
    Pucelle encore, à peine elle ose
    Payer le Printemps de retour.

    Au mois de juin, déjà plus pâle
    Et le coeur de désir troublé,
    Avec l'Eté tout brun de hâle
    Elle se cache dans le blé.

    Au mois d'août, bacchante enivrée,
    Elle offre à l'Automne son sein,
    Et roulant sur la...

  • On admire les fleurs de serre
    Qui loin de leur soleil natal,
    Comme des joyaux mis sous verre,
    Brillent sous un ciel de cristal.

    Sans que les brises les effleurent
    De leurs baisers mystérieux,
    Elles naissent, vivent et meurent
    Devant le regard curieux.

    A l'abri de murs diaphanes,
    De leur sein ouvrant le trésor,
    Comme de belles...

  • Pour que je t'aime, ô mon poëte,
    Ne fais pas fuir par trop d'ardeur
    Mon amour, colombe inquiète,
    Au ciel rose de la pudeur.

    L'oiseau qui marche dans l'allée
    S'effraye et part au moindre bruit ;
    Ma passion est chose ailée
    Et s'envole quand on la suit.

    Muet comme l'Hermès de marbre,
    Sous la charmille pose-toi ;
    Tu verras...

  • Deux fois je regarde ma montre,
    Et deux fois à mes yeux distraits
    L'aiguille au même endroit se montre ;
    Il est une heure... une heure après.

    La figure de la pendule
    En rit dans le salon voisin,
    Et le timbre d'argent module
    Deux coups vibrant comme un tocsin.

    Le cadran solaire me raille
    En m'indiquant, de son long doigt,
    Le chemin...

  • Un oiseau siffle dans les branches
    Et sautille gai, plein d'espoir,
    Sur les herbes, de givre blanches,
    En bottes jaunes, en frac noir.

    C'est un merle, chanteur crédule,
    Ignorant du calendrier,
    Qui rêve soleil, et module
    L'hymne d'avril en février.

    Pourtant il vente, il pleut à verse ;
    L'Arve jaunit le Rhône bleu,
    Et le salon, tendu...

  • Enfant aux airs d'impératrice,
    Colombe aux regards de faucon,
    Tu me hais, mais c'est mon caprice,
    De me planter sous ton balcon.

    Là, je veux, le pied sur la borne,
    Pinçant les nerfs, tapant le bois,
    Faire luire à ton carreau morne
    Ta lampe et ton front à la fois.

    Je défends à toute guitare
    De bourdonner aux alentours.
    Ta rue est à...

  • Dans le Generalife, il est un laurier-rose,
    Gai comme la victoire, heureux comme l'amour.
    Un jet d'eau, son voisin, l'enrichit et l'arrose ;
    Une perle reluit dans chaque fleur éclose,
    Et le frais émail vert se rit des feux du jour.

    Il rougit dans l'azur comme une jeune fille ;
    Ses fleurs, qui semblent vivre, ont des teintes de chair.
    On dirait, à...