Laissez couler, mes yeux, laissez couler vos pleurs,
Donnez nouvelles eaux à leur source lassée,
Mon coeur, ouvrez la porte aux plus vives douleurs,
Ma sentence de mort vient d'être prononcée !
Cette belle qui tient mon esprit attaché
D'un lien qui me fait adorer mon servage,
Ose dire qu'aimer est commettre un péché,
Et qu'en la désirant j'ai...
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Aime, si tu le veux, je ne l'empesche pas,
Mais aime pour le moins en homme de courage ;
N'asservis point ton coeur sous un vil esclavage,
Et ne demande point chaque jour le trépas.
La tempeste ne bruit que parmy les lieux bas,
Les monts voisins du Ciel sont pardessus l'orage ;
Quand tu souspirerois pour le plus beau visage,
Tu souspires en fin... -
Maintenant qu'un air doux nous ramene un beau Jour,
Considere, Phyllis, cette Saison nouvelle,
Comme elle rit au Ciel, et luy parle d'amour,
C'est parce qu'elle est jeune, et parce qu'elle est belle.
Cette fleur qui blanchit les arbres d'alentour,
Ce n'est pas une fleur qui doive estre éternelle
Desja dedans son sein la terre la rappelle,
Desja le... -
J'ay fait des vers toute ma vie
Et j'ay toute ma vie aimé ;
Ma pauvre veine en est tarie,
Et mon coeur en est consumé.
J'estois glorieux de te suivre,
Pere du sçavoir et du jour,
Et croiois aussi que l'Amour
Me feroit heureusement vivre.
Maintenant près de mes vieux ans
J'ay mille repentirs cuisans
De n'avoir pris un meilleur... -
Cleon, depuis le temps que tu perdis ton pere,
Tu vivois avec nous, comme l'un d'entre nous,
On ne t'en a point veu d'une humeur plus austere,
On ne t'en a point veu d'un visage moins doux.
Quand l'heure du disner te retiroit d'affaire
Ainsi que tu soulois, tu beuvois treize coups,
Et quand tu te sentois las de la bonne chere,
Le Cours ou... -
Je ne t'impute point l'amour que je te porte,
D'un objet tout divin mes sens y sont forcez,
Je sçay ce que tu vaux, Phyllis, et c'est assez,
Et je sçay ce que c'est d'un Amant de ma sorte.
N'apprehende donc point qu'un vain desir m'emporte,
Ny que je vueille voir mes maux recompensez ;
Je ne demande rien pour ceux qui sont passez,
Je ne demande... -
Songe, songe Mortel, que tu n'es rien que cendre
Et l'asseuré butin d'un funeste cercueil,
Porte haut tes desseins, porte haut ton orgueil,
Au gouffre du neant il te faudra descendre.
Qu'est enfin un Cesar, et qu'est un Alexandre
Dont les armes ont mis tant de peuples en dueil ?
Ils sont où les grandeurs doivent toutes se rendre
Et toutes se... -
Ton corps plus doux que ton esprit
S'exposait hier à ma vue,
Et d'un transport qui me surprit
Soulageait l'ardeur qui me tue.
Ton visage masqué me rit
Ainsi qu'au travers d'une nue,
Et sous le gant qui la couvrit
Ta main m'apparut demi nue.
Même pour mieux flatter mes sens
De mille plaisirs innocents,
Ton sein poussait hors... -
Tirsis, laisse parler le vulgaire insensé
Et n'ecoute jamais sinon ta conscience,
Chez elle seulement est le siege dressé
Qui doit te condamner ou prendre ta deffense,
Le plus beau de tes ans s'en va tantost passé,
Et tu n'as pas de vivre encore la science ;
Ton esprit hors de soy se trouve balancé
Et suit d'un faux honneur la trompeuse apparance.... -
Je ne vay point aux coups exposer ma bedaine
Moy qui ne suis connu n'y d'Armand ni du Roy ;
Je veux sçavoir combien un poltron comme moy
Peut vivre n'estant point Soldat ny Capitaine.
Je mourrois, s'il falloit qu'au milieu d'une plaine
Je fusse estropié de ce bras dont je boy ;
Ne me conte donc plus qu'on meurt autant chez soy,
A table, entre les...