• D'où vient, cher Le Vayer, que l'homme le moins sage
    Croit toujours seul avoir la sagesse en partage,
    Et qu'il n'est point de fou, qui, par belles raisons,
    Ne loge son voisin aux Petites-Maisons ?
    Un pédant enivré de sa vaine science,
    Tout hérissé de grec, tout bouffi d'arrogance,
    Et qui, de mille auteurs retenus mot pour mot,
    Dans sa tête entassés, n'a...

  • Rare et fameux esprit, dont la fertile veine
    Ignore en écrivant le travail et la peine ;
    Pour qui tient Apollon tous ses trésors ouverts,
    Et qui sais à quel coin se marquent les bons vers :
    Dans les combats d'esprit savant maître d'escrime,
    Enseigne-moi, Molière, où tu trouves la rime.
    On dirait quand tu veux, qu'elle te vient chercher :
    Jamais au bout du...

  • Damon, ce grand auteur, dont la muse fertile
    Amusa si longtemps et la cour et la ville,
    Mais qui, n'étant vêtu que de simple bureau,
    Passe l'été sans linge et l'hiver sans manteau ;
    Et de qui le corps sec et la mine affamée
    N'en sont pas mieux refait pour tant de renommée ;
    Las de perdre en rimant et sa peine et son bien,
    D'emprunter en tous lieux et de ne...

  • Cependant cet oiseau qui prône les merveilles,
    Ce monstre composé de bouches et d'oreilles,
    Qui, sans cesse volant de climats en climats,
    Dit partout ce qu'il sait et ce qu'il ne sait pas ;
    La Renommée enfin, cette prompte courrière,
    Va d'un mortel effroi glacer la perruquière ;
    Lui dit que son époux, d'un faux zèle conduit,
    Pour placer un lutrin doit...

  • Tout doit tendre au bon sens : mais, pour y parvenir,
    Le chemin est glissant et pénible à tenir ;
    Pour peu qu'on s'en écarte, aussitôt l'on se noie.
    La raison pour marcher n'a souvent qu'une voie.

    Un auteur quelquefois trop plein de son objet
    Jamais sans l'épuiser n'abandonne un sujet.
    S'il rencontre un palais, il m'en dépeint la face ;
    Il me promène...

  • ... Rien n'est beau que le vrai : le vrai seul est aimable ;
    Il doit régner partout, et même dans la fable :
    De toute fiction l'adroite fausseté
    Ne tend qu'à faire aux yeux briller la vérité.

    Sais-tu pourquoi mes vers sont lus dans les provinces,
    Sont recherchés du peuple, et reçus chez les princes ?
    Ce n'est pas que leurs sons, agréables, nombreux,
    ...

  • A quoi bon réveiller mes muses endormies,
    Pour tracer aux auteurs des règles ennemies ?
    Penses-tu qu'aucun d'eux veuille subir mes lois,
    Ni suivre une raison qui parle par ma voix ?
    O le plaisant docteur, qui, sur les pas d'Horace,
    Vient prêcher, diront-ils, la réforme au Parnasse.
    Nos écrits sont mauvais ; les siens valent-ils mieux ?
    J'entends déjà d'ici...

  • I1 est certains esprits dont les sombres pensées
    Sont d'un nuage épais toujours embarrassées ;
    Le jour de la raison ne le saurait percer.
    Avant donc que d'écrire, apprenez à penser.
    Selon que notre idée est plus ou moins obscure,
    L'expression la suit, ou moins nette, ou plus pure.
    Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement,
    Et les mots pour le dire...

  • La noblesse, Dangeau, n'est pas une chimère,
    Quand, sous l'étroite loi d'une vertu sévère,
    Un homme issu d'un sang fécond en demi-dieux,
    Suit, comme toi, la trace où marchaient ses aïeux.
    ais je ne puis souffrir qu'un fat, dont la mollesse
    N'a rien pour s'appuyer qu'une vaine noblesse,
    Se pare insolemment du mérite d'autrui,
    Et me vante un honneur qui ne...

  • (extrait)

    Je chante les combats, et ce prélat terrible
    Qui par ses longs travaux et sa force invincible,
    Dans une illustre église exerçant son grand coeur,
    Fit placer à la fin un lutrin dans le choeur.
    C'est en vain que le chantre, abusant d'un faux titre,
    Deux fois l'en fit ôter par les mains du chapitre :
    Ce prélat, sur le banc de son rival altier...