• Quand reviendra l'automne avec les feuilles mortes
    Qui couvriront l'étang du moulin ruiné,
    Quand le vent remplira le trou béant des portes
    Et l'inutile espace où la meule a tourné,

    Je veux aller encor m'asseoir sur cette borne,
    Contre le mur tissé d'un vieux lierre vermeil,
    Et regarder longtemps dans l'eau glacée et morne
    S'éteindre mon image et le pâle...

  • Quand je viendrai m'asseoir dans le vent, dans la nuit,
    Au bout du rocher solitaire,
    Que je n'entendrai plus, en t'écoutant, le bruit
    Que fait mon coeur sur cette terre,

    Ne te contente pas, Océan, de jeter
    Sur mon visage un peu d'écume :
    D'un coup de lame alors il te faut m'emporter
    Pour dormir dans ton amertume.

  • Quand on rentre chez soi, délivré de la rue,
    Aux fins d'automne où, gris cendré, le soir descend
    Avec une langueur qu'il n'a pas encore eue,
    La chambre vous accueille alors tel qu'un absent...

    Un absent cher, depuis longtemps séparé d'elle,
    Dont le visage aimé dormait dans le miroir ;
    Ô chambre délaissée, ô chambre maternelle
    Qui, toute seule, eût des...

  • Quand le soir est tombé dans la chambre quiète
    Mélancoliquement, seul le lustre émiette
    Son bruit d'incontenté dans le silence clos.
    Lustre toujours vibrant comme un arbre d'échos,

    Lustre aux calices fins en verre de Venise
    Où la douleur de la poussière s'éternise,
    Mais en gémissements qu'à peine on remarqua,
    Grêles comme un chagrin lointain d'harmonica...

  • Quand je suis à tes pieds, comme un fidèle au temple
    Immobile et pieux, quand fervent je contemple
    Ta bouche exquise ou flotte un sourire adoré,
    Tes cheveux blonds luisant comme un casque doré,
    Tes yeux penchés d?où tombe une douceur câline,
    Ton cou svelte émergeant d?un flot de mousseline,
    L?ombre de tes longs cils sur ta joue et tes seins
    Où mes baisers...

  • Quand je la vois briller sous un voile funeste,
    Comme une autre Diane, au milieu de la nuit,
    Quelle est mon aventure ? à quoi suis-je réduit ?
    Je demeure confus, sans parole, et sans geste.

    Vous à qui sa rigueur jamais rien ne conteste,
    Vous en qui ma pensée et ma flamme reluit,
    Allez, regards, soupirs, où l'Amour vous conduit :
    Votre douce...

  • Je sais, quand le midi leur fait désirer l'ombre,
    Entrer à pas muets sous le roc frais et sombre,
    D'où parmi le cresson et l'humide gravier
    La naïade se fraye un oblique sentier.
    Là j'épie à loisir la nymphe blanche et nue
    Sur un banc de gazon mollement étendue,
    Qui dort, et sur sa main, au murmure des eaux,
    Laisse tomber son front couronné de roseaux...

  • Quand ton nom je veux faire aux effets rencontrer
    De la soeur de Phébus, qui chaste, et chasseresse
    Est tant au ciel qu'en terre, et aux enfers Déesse,
    Elle fort dissemblable à toi se vient montrer.

    Diane les chiens mène, et aux pans fait entrer
    Ses cerfs : tu peux mener les grands héros en laisse,
    Ains les prendre en tes rets ; son arc le seul corps...

  • Quand je veux mesurer votre auguste hautesse
    A l'état abaissé de mon coeur langoureux,
    Je me plains de l'amour, ce tyran rigoureux,
    Qui par si haut objet abusa ma jeunesse,

    D'autant que le penser qui m'élève sans cesse
    Presque ne peut atteindre à cet astre amoureux,
    Tant que hors d'espérance, il me faut, malheureux,
    Redoutant le destin maudir' la...

  • J'étais en liberté quand celle qui m'engage
    Dessous un voile blanc me cachait ses beaux yeux,
    Mais las ! c'était en vain, car l'épais d'un nuage
    Ne le saurait cacher comme l'astre des cieux.

    Puis opposant ma vue à ses rais gracieux,
    Je la suivais partout sans prévoir mon dommage.
    Je lui fis déplaisir d'être si curieux,
    Elle de me blesser m'en fit...