• Il fait nuit : le vent souffle et passe dans ma lyre ;
    Ma lyre tristement s’éveille auprès de moi :
    On dirait qu’elle pleure un tourment, un délire ;
    On dirait qu’elle essaie à se plaindre de toi ;
    De toi, qu’elle appelait pour m’aider à t’attendre,
    Qui la rendis si vraie, et par malheur si tendre !
    Car tu ne peux ravir à ses accords touchants
    Ton nom...

  • J’étais à toi peut-être avant de t’avoir vu.
    Ma vie, en se formant, fut promise à la tienne ;
    Ton nom m’en avertit par un trouble imprévu,
    Ton âme s’y cachait pour éveiller la mienne.
    Je l’entendis un jour, et je perdis la voix ;
    Je l’écoutai longtemps, j’oubliai de répondre.
    Mon être avec le tien venait de se confondre,
    Je crus qu’on m’appelait pour...

  • Il avait dit un jour : « Que ne puis-je auprès d’elle,
    ( Elle, alors, c’était moi ! ) que ne puis-je chercher
    Ce bonheur entrevu qu’elle veut me cacher !
    Son cœur paraît si tendre ; oh ! s’il était fidèle ! »
    Puis, fixant ses regards sur mon front abattu,
    Du charme de ses yeux il m’accablait encore,
                Et ses yeux que j’adore
    Portaient jusqu’...

  •     Peut-être un jour sa voix tendre et voilée
        M’appellera sous de jeunes cyprès :
        Cachée alors au fond de la vallée,
    Plus heureuse que lui, j’entendrai ses regrets.
    Lentement, des coteaux je le verrai descendre ;
    Quand il croira ses pas et ses vœux superflus,
    Il pleurera ! ses pleurs rafraîchiront ma cendre :
    Enchaînée à ses pieds, je ne le...

  • Mère ! faut-il donner quand le pauvre est bien laid ?
    Qu’il ne fait pas sa barbe et qu’elle est toute noire,
         Et qu’il ne dit pas s’il vous plaît !
    Faut-il donner ?
                — Enfant ! tu n’as pas de mémoire :
    Le pauvre qui demande est l’envoyé de Dieu ;
    Qu’importe s’il a fait sa barbe et sa parure ;
    Il est beau du malheur écrit sur sa figure,...

  • Pays des noirs ! berceau du pauvre Arsène,
    Ton souvenir vient-il chercher mon cœur ?
    Vent de Guinée, est-ce la douce haleine
    Qui me caresse et charme ma douleur ?
    M’apportes-tu les soupirs de ma mère,
    Ou la chanson qui console mon père ?…
    Jouez, dansez, beaux petits blancs ;
    Pour être bons, restez enfants !

    Nègre captif, couché sur le rivage,...

  • Pour la douzième fois, hier, sur ma demeure,
    Nuit lente, tu passais sans jeter de pavots ;
    Sur mon cœur malheureux je sentais tomber l’heure,
    Et l’écho répétait l’heure avec mes sanglots ;
    Je regardais, sans voir, une lampe inutile
    Dont les rayons brûlaient ma paupière immobile :
    « Elle s’éteint, » disais-je : hélas ! c’étaient mes pleurs,
    Qui d’un...

  • Adieu, douce pensée,
    Image du plaisir !
    Mon âme est trop blessée,
    Tu ne peux la guérir.
    L’espérance légère
      De mon bonheur
    Fut douce et passagère,
      Comme ta fleur.

    Rien ne me fait envie,
    Je ne veux plus te voir.
    Je n’aime plus la vie,
    Qu’ai-je besoin d’espoir ?
    En ce moment d’alarme
      Pourquoi t’offrir ?
    Il...

  • Oh ! de l'air ! des parfums ! des fleurs pour me nourrir !
    Il semble que les fleurs alimentent ma vie ;
    Mais elles vont mourir.... Ah ! je leur porte envie :
    Mourir jeune, au soleil, Dieu ! que c'est bien mourir !

    Pour éteindre une fleur il faut moins qu'un orage :
    Moi, je sais qu'une larme effeuille le bonheur.
    À la fleur qu'on va fuir qu'importé un long...

  • Te souvient-il, ma sœur, du rempart solitaire
    Où nous cherchions, enfants, de l’ombrage et des fleurs ?
    Et de cette autre enfant qui passait sur la terre,
    Pour sourire à nos jeux, pour y charmer nos pleurs ?
    Son dixième printemps la couronnait de roses :
    Marie était son nom, Rose y fut ajouté.
    Pourquoi ces tendres fleurs, dans leur avril écloses,
    ...