• Petite maison basse, au grand chapeau pointu,
    Qui, d'hiver en hiver, semble s'être enfoncée
    Dans la terre sans fleurs, autour d'elle amassée.
    Petite maison grise, au grand chapeau pointu,
    Au lointain bleu, là-bas, dis-le-moi, que vois-tu ?

    Par les yeux clignotants de ta lucarne rousse,
    Pour voir plus clair, plus loin, tu sembles faire effort,
    Et...

  • Maison de la naissance, ô nid, doux coin du monde !
    Ô premier univers où nos pas ont tourné !
    Chambre ou ciel, dont le coeur garde la mappemonde,
    Au fond du temps je vois ton seuil abandonné.
    Je m'en irais aveugle et sans guide à ta porte,
    Toucher le berceau nu qui daigna me nourrir.
    Si je deviens âgée et faible, qu'on m'y porte !
    Je n'y pus vivre enfant, j'y...

  • Poésie ! ô trésor ! perle de la pensée !
    Les tumultes du coeur, comme ceux de la mer,
    Ne sauraient empêcher ta robe nuancée
    D'amasser les couleurs qui doivent te former.
    Mais sitôt qu'il te voit briller sur un front mâle,
    Troublé de ta lueur mystérieuse et pâle,
    Le vulgaire effrayé commence à blasphémer.

    Le pur enthousiasme est craint des faibles âmes...

  • A Eva

    Si ton coeur, gémissant du poids de notre vie,
    Se traîne et se débat comme un aigle blessé,
    Portant comme le mien, sur son aile asservie,
    Tout un monde fatal, écrasant et glacé ;
    S'il ne bat qu'en saignant par sa plaie immortelle,
    S'il ne voit plus l'amour, son étoile fidèle,
    Eclairer pour lui seul l'horizon effacé ;

    Si ton âme...

  • Eva, qui donc es-tu ? Sais-tu bien ta nature ?
    Sais-tu quel est ici ton but et ton devoir ?
    Sais-tu que, pour punit l'homme, sa créature,
    D'avoir porté la main sur l'arbre du savoir,
    Dieu permit qu'avant tout, de l'amour de soi-même
    En tout temps, à tout âge, il fît son bien suprême,
    Tourmenté de s'aimer, tourmenté de se voir ?

    Mais si Dieu près...

  • La maison serait blanche et le jardin sonore
    De bruits d'eaux vives et d'oiseaux,
    Et le lierre du mur qui regarde l'aurore
    Broderait d'ombres les rideaux

    Du lit tiède où, mêlés comme deux tourterelles,
    Las d'un voluptueux sommeil,
    Nous souririons, heureux de nous sentir des ailes
    Aux premiers rayons du soleil.

    Cette maison n'aurait sous l'...

  • Entrerai-je, ce soir, Seigneur, dans ta maison,
    Sans craindre que ma chair, vouée aux oeuvres viles,
    Apporte le relent de luxure des villes
    A la candeur des jupes d'ombre en oraison ?

    Je songe à d'autres jupes d'ombre qui sont douces
    Pour endormir l'effroi des poètes malades,
    A des doigts alourdis d'anneaux aux pierres troubles,
    Troubles comme des...

  • La maison dort au coeur de quelque vieille ville
    Où des dames s'en vont, lasses de bonnes oeuvres,
    S'assoupir en suivant l'office de six heures,
    Ville où le rouet gris de l'ennui se dévide.

    Dans la cour un bassin où pleurent les eaux vives
    D'avoir vu verdir les Tritons et d'être seules.
    Et la maison laisse gémir les eaux jaseuses ;
    Ses yeux sont...

  • Dans le silence et dans le soir de la maison
    A retenti le carillon de la pendule.
    On ne sait si joyeux ou triste, un air ondule :
    Tantôt le chapelet de l'heure en oraison ;

    Puis ce semble un oiseau si peu viable et frêle
    Qui se baigne et qui joue avec des perles d'eau ;
    Puis du verre qui pleut mêlé de fer qui grêle ;
    Etincelles de bruit sous un vague...

  • Face au midi, bien adossée
    A l'ancien étang féodal
    Dont elle épaule la chaussée,
    Elle fut le moulin banal

    Où deux ou trois pauvres villages
    Et quelques petits mas perdus,
    Avec leurs maigres attelages
    Plusieurs siècles sont descendus

    Moudre, au tic tac vieillot et grêle
    D'un mécanisme trébuchant,
    Tout ce que la dîme ou la grêle
    ...