Au tribunal d'amour, après mon dernier jour,
Mon coeur sera porté diffamé de brûlures,
Il sera exposé, on verra ses blessures,
Pour connaître qui fit un si étrange tour,
A la face et aux yeux de la Céleste Cour
Où se prennent les mains innocentes ou pures ;
Il saignera sur toi, et complaignant d'injures
Il demandera justice au juge aveugle Amour...
-
-
Nos désirs sont d'amour la dévorante braise,
Sa boutique nos corps, ses flammes nos douleurs,
Ses tenailles nos yeux, et la trempe nos pleurs,
Nos soupirs ses soufflets, et nos sens sa fournaise.
De courroux, ses marteaux, il tourmente notre aise
Et sur la dureté, il rabat nos malheurs,
Elle lui sert d'enclume et d'étoffe nos coeurs
Qu'au feu trop... -
N'a doncques peu l'amour d'une mignarde rage,
D'un malheur bien heureux, d'un malheureux bonheur
Combattre votre ennui, et mêler la couleur
D'un oeillet, sur le lys de votre blanc visage !
C'est à cette blancheur, que l'amour fait hommage,
C'est l'honneur de vos yeux, c'est encor' l'autre honneur
Qui rit en votre front. Mais c'est plutôt malheur
Qu'un... -
Doctime amy, qu'Amour docteur anime
Au bellime art des sçavantismes Sioeurs :
Tu vas goustant leurs saintimes douçieurs,
Enflant ta veine en rime coulantime.
Ton coeur bravime, et ta voix bruyantime,
Santant ainsi nos longuimes errieurs,
Hautime suyt ses brusquimes furieurs,
Chaudimes or' d'une ardieur si gentime.
Je ne t'escry pour... -
Qu'est-ce qu'amour ? est-ce une quinte essence ?
Est-ce un démon ? est-ce un tyran, un roi ?
Est-ce une idée ? est-ce un je ne sais quoi ?
Est-ce du ciel quelque sourde influence,
Que j'alambique et qui me tient en transe,
Qui me rend serf, qui me donne la loi,
Qui me ravit, qui me dérobe à moi,
Qui fait que vieil je demeure en enfance ?
S'il... -
Amour, adieu, je prends congé de toi
Amour, adieu, je m'en vais, je te laisse,
Je ne veux plus aimer cette maîtresse
Qui m'a tenu si longtemps en émoi.
Je ne veux plus la voir rire de moi,
S'éjouissant de me voir en tristesse.
Ni son bel oeil, qui m'oeillade sans cesse,
Ni de sa bouche une parjure foi,
Ni sa beauté, de moi tant admirée,... -
Amour au coeur déjà me fait sentir
Des ans passés un honteux repentir
Qui me faisait ignorer sa puissance :
Déjà en moi je me sens accusé
D'ainsi avouer de ma vie abusé,
Me repaissant de fausse jouissance.
J'étais content, mais pour rien ne vouloir ;
J'étais joyeux de point ne me douloir ;
Mon heur passait sans que je l'aperçusse,
Je... -
Elle m'avait un jour mon coeur rendu,
Non pas rendu, prêté, que dois-je dire ?
J'avais mon coeur, et moi fier et de rire
Comme d'un don des hauts cieux descendu.
Mais, ô dur prêt, je l'ai brièvement dû,
Car tout soudain elle à soi le retire
Puis le me geint et puis le me martyre.
Ris malheureux, que tu m'es cher vendu !
Que pensait-elle... -
L'âge d'or précieux
Délaissant la terre ronde,
Saturne, chassé des cieux,
Laissa l'empire du monde.
Et lors ses trois fils, pervers,
Avançant leur héritage,
Départirent l'univers
Chacun selon son partage.
Jupiter eut par hasard
Le ciel tournoyant la terre,
Et fortifia sa part
Des foudres et du tonnerre.
... -
Quelque lieu, quelque amour, quelque loi qui t'absente,
Et ta déité tâche ôter de devant moi,
Quelque oubli qui, contraint de lieu, d'amour, de loi,
Fasse qu'en tout absent de ton coeur je me sente,
Tu m'es, tu me seras sans fin pourtant présente
Par le nom, par l'effet fatal qui est en toi,
Par tout tu es Diane, en tout rien je ne vois,
Qui mon...