• Elle exprimait encor la cause douloureuse
    De ses pleurs, quand elle oit un petit bruit léger
    A son dos ; et soudain cette aveugle amoureuse
    Se tourne et voit le Christ, mais c'est comme étranger.

    " Ô femme, lui dit-il, quel deuil te peut ranger
    A tant et tant de pleurs ? Que cherches-tu, pleureuse ?
    - Ah, dit-elle, Seigneur, si ta main valeureuse
    A mon...

  • Cy gist le corps de la plus heureuse ame
    Qui oncques fut ou soit pour sa beauté,
    Ou pour ses meurs, ou pour sa loyaulté,
    Ou pour avoir esté d'un amy femme.

    Amy qui a or le bruyt et la fame
    D'un vif exemple et seur de fermetté,
    Qui ce corps mort, ce corps tant regretté,
    Plus mort luy mesme a mys soubz ceste lame.

    Pas n'eust voulu seul...

  • Quand au dernier sommeil la Vierge eust clos les yeux,
    Les Anges qui veilloyent autour de leur maistresse,
    Esleverent son corps en la gloire des Cieux,
    Et les Cieux furent pleins de nouvelle allegresse.

    Les plus hauts Séraphins à son advenement
    Sortoient au devant d'elle et luy cedoient la place,
    Se sentant tous ravis d'aise et d'estonnement
    De...

  • Marie, vous passez en taille, et en visage,
    En grâce, en ris, en yeux, en sein, et en téton,
    Votre moyenne soeur, d'autant que le bouton
    D'un rosier franc surpasse une rose sauvage.

    Je ne dis pas pourtant qu'un rosier de bocage
    Ne soit plaisant à l'oeil, et qu'il ne sente bon ;
    Aussi je ne dis pas que votre soeur Thoinon
    Ne soit belle, mais quoi ? vous...

  • Marie, vous avez la joue aussi vermeille
    Qu'une rose de mai, vous avez les cheveux
    De couleur de châtaigne, entrefrisés de noeuds,
    Gentement tortillés tout autour de l'oreille.

    Quand vous étiez petite, une mignarde abeille
    Dans vos lèvres forma son doux miel savoureux,
    Amour laissa ses traits dans vos yeux rigoureux,
    Pithon vous fit la voix à nulle...

  • Marie, baisez-moi ; non, ne me baisez pas,
    Mais tirez-moi le coeur de votre douce haleine ;
    Non, ne le tirez pas, mais hors de chaque veine
    Sucez-moi toute l'âme éparse entre vos bras ;

    Non, ne la sucez pas ; car après le trépas
    Que serais-je sinon une semblance vaine,
    Sans corps, dessus la rive, où l'amour ne démène
    (Pardonne-moi, Pluton) qu'en feintes...

  • Marie, qui voudrait votre beau nom tourner,
    Il trouverait Aimer : aimez-moi donc, Marie,
    Faites cela vers moi dont votre nom vous prie,
    Votre amour ne se peut en meilleur lieu donner.

    S'il vous plaît pour jamais un plaisir demener,
    Aimez-moi, nous prendrons les plaisirs de la vie,
    Pendus l'un l'autre au col, et jamais nulle envie
    D'aimer en autre lieu...

  • Marie, que je sers en trop cruel destin,
    Quand d'un baiser d'amour votre bouche me baise,
    Je suis tout éperdu, tant le coeur me bat d'aise.
    Entre vos doux baisers puissé-je prendre fin !

    Il sort de votre bouche un doux flair, qui le thym,
    Le jasmin et l'oeillet, la framboise et la fraise
    Surpasse de douceur, tant une douce braise
    Vient de la bouche au...

  • Je ne suis seulement amoureux de Marie,
    Anne me tient aussi dans les liens d'Amour,
    Ore l'une me plaît, ore l'autre à son tour :
    Ainsi Tibulle aimait Némésis, et Délie.

    On me dira tantôt que c'est une folie
    D'en aimer, inconstant, deux ou trois en un jour,
    Voire, et qu'il faudrait bien un homme de séjour,
    Pour, gaillard, satisfaire à une seule amie....