• Des astres, des forêts, et d'Achéron l'honneur,
    Diane au monde haut, moyen et bas préside,
    Et ses chevaux, ses chiens, ses Euménides guide,
    Pour éclairer, chasser, donner mort et horreur.

    Tel est le lustre grand, la chasse et la frayeur
    Qu'on sent sous ta beauté claire, prompte, homicide,
    Que le haut Jupiter, Phébus, et Pluton cuide
    Son foudre moins...

  • Ô traistres vers, trop traistres contre moy,
    Qui souffle en vous une immortelle vie,
    Vous m'apastez et croissez mon envie,
    Me déguisant tout ce que j'apperçoy.

    Je ne voy rien dedans elle pourquoy
    A l'aimer tant ma rage me convie :
    Mais nonobstant ma pauvre ame asservie
    Ne me la feint telle que je la voy.

    C'est donc par vous, c'est par vous...

  • Quel tourment, quelle ardeur, quelle horreur, quel orage
    Afflige, brûle, étonne et saccage mes sens ?
    Ah ! c'est pour ne pouvoir en l'ardeur que je sens
    Adorer ma déesse. Est-il plus grande rage ?

    Servir, parler et voir, dévot lui rendre hommage,
    Se brûler au brasier de ces flambeaux luisants,
    Pourrait anéantir tous mes travaux présents,
    Mais las !...

  • Combien de fois mes vers ont-ils doré
    Ces cheveux noirs dignes d'une Meduse ?
    Combien de fois ce teint noir qui m'amuse,
    Ay-je de lis et roses coloré ?

    Combien ce front de rides labouré
    Ay-je applani ? et quel a fait ma Muse
    Ce gros sourcil, où folle elle s'abuse,
    Ayant sur luy l'arc d'amour figuré?

    Quel ay-je fait son oeil se renfonçant...

  • En quelle nuit, de ma lance d'ivoire,
    Au mousse bout d'un corail rougissant,
    Pourrai-je ouvrir ce boutin languissant,
    En la saison de sa plus grande gloire ?

    Quand verserai-je, au bout de ma victoire,
    Dedans sa fleur le cristal blanchissant,
    Donnant couleur à son teint pâlissant,
    Sous le plaisir d'une longue mémoire ?

    Puisse elle tôt à bonne...

  • Plutôt la mort me vienne dévorer,
    Et engloutir dans l'abîme profonde
    Du gouffre obscur de l'oblivieuse onde,
    Qu'autre que toi, l'on me voit adorer.

    Mon bracelet, je te veux honorer
    Comme mon plus précieux en ce monde :
    Aussi viens-tu d'une perruque blonde,
    Qui pourrait l'or le plus beau redorer.

    Mon bracelet, mon cher mignon, je t'aime...

  • J'aime le verd laurier, dont l'hyver ny la glace
    N'effacent la verdeur en tout victorieuse,
    Monstrant l'eternité à jamais bien heureuse
    Que le temps, ny la mort ne change ny efface.

    J'aime du hous aussi la toujours verte face,
    Les poignans eguillons de sa fueille espineuse :
    J'aime la lierre aussi, et sa branche amoureuse
    Qui le chesne ou le mur...

  • Tu sçais, o vaine Muse, o Muse solitaire
    Maintenant avec moy, que ton chant qui n'a rien
    De vulgaire, ne plaist non plus qu'un chant vulgaire.

    Tu sçais que plus je suis prodigue de ton bien
    Pour enrichir des grans l'ingrate renommée
    Et plus je perds le tems, ton espoir et le mien.

    Tu sçais que seulement toute chose est aymée
    Qui fait d'un...

  • Myrrhe bruloit jadis d'une flamme enragée,
    Osant souiller au lict la place maternelle
    Scylle jadis tondant la teste paternelle,
    Avoit bien l'amour vraye en trahison changée.

    Arachne ayant des Arts la Deesse outragée,
    Enfloit bien son gros fiel d'une fierté rebelle :
    Gorgon s'horrible bien quand sa teste tant belle
    Se vit de noirs serpens en lieu de poil...