LA messe nocturne est dite.
Que d’étoiles dans le ciel !
Comme il gèle ! Rentrons vite.
La rude nuit de Noël !

Chacun du froid se protège
En fermant porte et rideaux.
Sous leurs capuchons de neige
Les maisons font le gros dos....

A quoi pensez-vous, ô drapeaux
De nos dernières citadelles,
Vous qui comptez plus de corbeaux
Dans notre ciel que d’hirondelles ?

A quoi penses-tu, laboureur,
Qui, dans un sillon de charrue,
Te détournes devant l’horreur
D’une tête humaine apparue ?...

Sur la plage élégante au sable de velours
Que frappent, réguliers et calmes, les flots lourds,
Tels que des vers pompeux aux nobles hémistiches,
Les enfants des baigneurs oisifs, les enfants riches,
Qui viennent des hôtels voisins et des chalets,
La jaquette...

 
En fait de postiche fantasque,
Et de déguisement joyeux,
L'âge me poudre les cheveux,
Et les rides m'ont mis un masque.

Mais, bien que vieux et maladif
J'aime les jeunes gens, et j'aime
Qu'ils célèbrent la Mi-Carême,
Comme la bon peuple naïf....

 

Tu n’as pas toujours été sage,
Toi dont le cœur bat sur mon bras.
Pour plus d’un amant de passage
Tu souris et tu soupiras.

D’une voix honteuse et farouche
Tu me l’as dit par un soir bleu ;
Mais ma bouche a fermé ta bouche,
Que purifiait ton...

 
À madame Judith Mendès.

À la fin de juillet les villages sont vides.
Depuis longtemps déjà des nuages livides,
Menaçant d’un prochain orage à l’occident,
Conseillaient la récolte au laboureur prudent.
Donc voici la moisson, et bientôt la vendange ;...

 

Je ne fus heureux ― pas souvent ―
Que par le baiser, je l’avoue.
J’aimais les lèvres sur ma joue,
Quand j’étais un petit enfant.

Le baiser seulement me touche.
Ma jeunesse et mon âge mûr
L’ont cherché, sensuel ou pur ;
Et l’on me baisa sur la...

 
Non loin du piédestal où j’étais accoudé,
A l’ombre d’un Sylvain de marbre démodé
Et sur un banc perdu du jardin solitaire,
Je vis une servante auprès d’un militaire.

Ils se tenaient tous deux assis à chaque coin
Du banc, et se parlaient doucement, mais de...

 
Or, en mil huit cent neuf, nous prîmes Saragosse.
J’étais sergent. Ce fut une journée atroce.
La ville prise, on fit le siège des maisons,
Qui, bien closes, avec des airs de trahisons,
Faisaient pleuvoir les coups de feu par leurs fenêtres.
On se disait tout...

O mon cœur, es-tu donc si débile et si lâche,
Et serais-tu pareil au forçat qu’on relâche
Et qui boite toujours de son boulet traîné ?
Tais-toi, car tu sais bien qu’elle t’a condamné.
Je ne veux plus souffrir et je t’en donne l’ordre.
Si je te sens encor te gonfler...