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    Je fus dès la mamelle un homme de douleur ;
    Mon cœur, au lieu de sang, ne roule que des larmes ;
    ou plutôt de ces pleurs Dieu m’a ravi les charmes,
    Il a pétrifié les larmes dans mon cœur.
    L’amertume est mon miel, la tristesse est ma joie ;
    Un instinct fraternel m’attache à tout cercueil ;
    Nul chemin ne m’arrête, à moins que je n’y voie...

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    Grillon solitaire
    Ici comme moi,
    Voix qui sors de terre,
    Ah ! réveille-toi !
    J'attise la flamme,
    C'est pour t'égayer ;
    Mais il manque une âme,
    Une âme au foyer !

    Grillon solitaire,
    Voix qui sors de terre,
    Ah ! réveille-toi
    Pour moi !

    Quand j'étais petite
    Comme ce berceau,
    Et que...

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    Seconde voix du cœur qui pleure,
    Larme sonore du saint lieu,
    Poésie, harpe intérieure,
    Seule langue qui parle à Dieu !

    Ce roi de la lyre divine,
    A qui le Seigneur en fit don,
    Te pressait contre sa poitrine
    Pour lui dire : « Grâce ! » ou : « Pardon ! »

    Ah! sur tes cordes attendries
    Toute âme humaine a son accent...

  • Toi, dont le monde encore ignore le vrai nom,
    Esprit mystérieux, mortel, ange ou démon,
    Qui que tu sois, Byron, bon ou fatal génie,
    J’aime de tes concerts la sauvage harmonie,
    Comme j’aime le bruit de la foudre et des vents
    Se mêlant dans l’orage à la voix des torrents !
    La nuit est ton séjour, l’horreur est ton domaine :
    L’aigle, loin des déserts,...

  • Frappe encore, ô Douleur, si tu trouves la place !
    Frappe, ce cœur saignant t'abhorre et te rend grâce,
    Puissance qui ne sais plaindre ni pardonner !
    Quoique mes yeux n'aient plus de pleurs à te donner,
    Il est peut-être en moi quelque fibre sonore
    Qui peut sous ton regard se torturer encore,
    Comme un serpent coupé, sur le chemin gisant,
    Dont le tronçon...

  • Verbe incréé! source féconde
    De justice et de liberté!
    Parole qui guéris le monde!
    Rayon vivant de vérité!
    Est-il vrai que ta voix d'âge en âge entendue,
    Pareille au bruit lointain qui meurt dans l'étendue,
    N'a plus pour nous guider que des sons impuissants?
    Et qu'une voix plus souveraine,
    La voix de la parole humaine,
    Étouffe à jamais tes...

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    Elève-toi, mon âme, au-dessus de toi-même :
    Voici l'épreuve de ta foi !
    Que l'impie, assistant à ton heure suprême,
    Ne dise pas : « Voyez, il tremble comme moi ! »

    La voilà, cette heure suivie
    Par l'aube de l'éternité,
    Cette heure qui juge la vie
    Et sonne l'immortalité !
    Et tu pâlirais devant elle,
    Ame à l'...

  • Le jour s'éteint sur tes collines,
    Ô terre où languissent mes pas !
    Quand pourrez-vous, mes yeux, quand pourrez-vous, hélas !
    Saluer les splendeurs divines
    Du jour qui ne s'éteindra pas ?

    Sont-ils ouverts pour les ténèbres,
    Ces regards altérés du jour ?
    De son éclat, ô Nuit ! à tes ombres funèbres
    Pourquoi passent-ils tour à tour ?

    Mon...

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    La terre n'était plus qu'une tombe fermée ;
    Masse informe et muette, éteinte, inanimée,
    Elle flottait au rang qu'elle avait occupé,
    Comme un vaisseau muet que la foudre a frappé,
    Quand la main qui le guide est tombée en poussière,
    Suit encore un moment sa rapide carrière,
    Puis chancelle et s'arrête, et de ses flancs déserts
    ...

  • Pourquoi bondissez-vous sur la plage écumante,
    Vagues dont aucun vent n’a creusé les sillons ?
    Pourquoi secouez-vous votre écume fumante
    En légers tourbillons ?

    Pourquoi balancez-vous vos fronts que l’aube essuie,
    Forêts, qui tressaillez avant l’heure du bruit ?
    Pourquoi de vos rameaux répandez-vous en pluie
    Ces pleurs silencieux dont...