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    Le repentir songeur n’use plus leurs genoux.
    Parmi les champs malsains et les villes malades
    Elles dansent, ainsi que de noires Ménades.
    Parfois le vent du soir éteint leurs cierges roux.

    Elles ont coupé leurs chevelures altières ;
    Le cilice a mordu leurs seins endoloris
    Leurs psaumes, soupirés ou jetés à grands cris,
    S’accompagnent du son...

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            Et je regrette et je cherche Psappha

        Et je regrette et je cherche ton doux baiser.
        Quelle femme saurait me plaire et m’apaiser ?
        Laquelle apporterait les voluptés anciennes
        Sur des lèvres sans fard et pareilles aux tiennes ?

        Je le sais, tu mentais, ton rire sonnait creux
        Mais ton baiser fut lent,...

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    Pendant longtemps, je fus clouée au pilori,
    Et des femmes, voyant que je souffrais, ont ri.

    Puis, des hommes ont pris dans leurs mains une boue
    Qui vint éclabousser mes tempes et ma joue.

    Les pleurs montaient en moi, houleux comme des flots,
    Mais mon orgueil me fit refouler mes sanglots.

    Je les voyais ainsi, comme à travers un songe
    Affreux...

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        Il porte obscurément la pourpre du poète,
        Ce passant qu’on rencontre au détour du chemin,
        Vers lequel nul ne tend sa secourable main
        Et qui lève vers l’aube un front large d’ascète.

        Mais sous le grand manteau percé de mille trous,
        Si vieux qu’il est pareil aux innombrables toiles
        Que l’araignée a su tramer sous les...

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        J’aime l’avril et l’eau, l’arc-en-ciel et la lune,
        J’aime tout ce qui change et qui trompe et qui fuit.
        Mon rire est inconstant autant que la fortune,
        Et je mens, car je suis la fille de la nuit.

        Et la nuit reconnaît en moi sa fille tendre.
        Elle me fait venir dans les bois endormis
        Et me donne l’ouïe exquise pour entendre...

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    La lune se levait autrefois à Lesbos
    Sur le verger nocturne où veillaient les amantes.
    L’amour rassasié montait des eaux dormantes
    Et sanglotait au cœur profond des sarbitos.

    Psappha ceignait son front d’auguste violettes
    Et célébrait l’Eros qui s’abat comme un vent
    Sur les chênes… Atthis l’écoutait en rêvant,
    Et la torche avivait l’éclat des...

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        Les quatre Vents se sont réunis sous mon toit.
        Voici le Vent du Nord revêtu de blanc froid…
        Voici le Vent du Sud portant les odeurs chaudes
        Et toi, Vent de l’Ouest, qui pleures et qui rôdes !…

        Te voici, Vent de l’Est amer et bienfaisant,
        Toi dont les larges cris font trembler les cœurs lâches,
        Toi qui grondes, toi qui...

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                I. Sonnet irrégulier


                No, Time, thou shalt not boast that I do change.
                Shakespeare, sonnet CXXIII

            O temps ! ô conquérant ! te voici vaincu, toi
            L’invincible, toi qui gardes un front tranquille !
            Tu te vantes que tout change. Certes. Mais moi
            Pourtant,...

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    La marée, en dormant, prolonge un souffle égal,
    L’âme des conques flotte et bruit sur les rives…
    Tout m’est hostile, et ma jeunesse me fait mal.
    Je suis lasse d’aimer les formes fugitives.
    Debout, je prends mon cœur où l’amour fut hier
    Si puissant, et voici : je le jette à la mer.

    Qu’une vague légère et dansante l’emporte,
    Que la mer l’associe...

  • Tes bras — O le poison qu’en vain tu dissimules !
    M’enserrent froidement, comme des tentacules.

    Viens, nous pénétrerons le secret du flot clair,
    Et je t’adorerai, comme Un Noyé la mer,

    Les crabes dont la faim se repaît de chair morte
    Nous...