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    Si j’étais jeune fille, et si, dans ma saison,
    J’étais belle et poëte,
    Pour chanter, j’aimerais mieux un nid de pinson
    Qu’un trépied de prophète ;
    Je saurais peu quel vent pousse l’humanité
    Et quel trône vacille ;
    Mais je dirais son nom à chaque fleur, l’été,
    Si j’étais jeune fille.

    Je n’aurais jamais lu nos apôtres nouveaux ;
    ...

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    Sur cette œuvre, au matin, devant vous, commencée,
    La prière, ô mon Dieu, prosterna ma pensée ;
    Je m’agenouille encore, à l’approche du soir,
    Sur ce livre imparfait qui trompa mon espoir.
    Je viens ; et, vous offrant les douleurs de l’artiste,
    Du fruit de mon labeur, à vos pieds je m’attriste ;
    Mais, si chétif qu’il soit, je veux vous en bénir ;...

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    Voici l’automne, adieu les fleurs !
    Que faire en un jardin sans roses
    Où sifflent des vents querelleurs ?
    Restons au logis, portes closes ;
    Voici l’automne, adieu les fleurs !

    Voici l’automne, adieu les fleurs !
    La terre en vain cherche à sourire ;
    Les soleils sont froids et railleurs,
    Les cœurs n’ont plus rien à se dire.
    Voici l’...

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    I

    Dans les villes, tombeaux dont le peuple croit vivre,
    Où s'agitent des morts par des morts coudoyés,
    Où l'âme aspire un air qui la tue ou l'enivre,
    Ceux qui sont nés à Dieu sont bientôt oubliés.

    Là, des spectres faisant de l'ombre et du tumulte,
    Vous cachent à mes yeux, vous-même, ô mon ami !
    Et j'omets tout un jour de vous rendre mon culte...

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    J'irai boire l'eau vierge aux sources des grands fleuves ;
    Mes pieds se poseront sur l'azur du glacier.
    Je veux baigner mon corps aux flots des brises neuves,
    L'éther le trempera comme l'onde l'acier.

    Dormons sur une cime avec effort gravie ;
    Dans la neige éternelle il faut laver nos mains ;
    L'air fait mouvoir là-haut des principes de vie,
    ...

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    I

    Un esprit gardien de toute pureté
    Habite les glaciers et la neige éternelle.
    L'air qu'on respire autour de ce faite argenté
    Rajeunit l'âme et jette une lumière en elle.

    O vierge ! cette nuit, dans son fluide azur,
    Semble exprès pour mes yeux dissiper tous tes voiles ;
    J'adore en sa blancheur ton front chargé d'étoiles.
    En toi, jusqu'à...

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    I

    Beau lac, j’ai vu, de ce bois sombre,
    Tes flots s’embraser au soleil ;
    Ils brillaient de couleurs sans nombre,
    De bleu, d’orangé, de vermeil.

    Mais cet azur, ces roses vives,
    Cet or qui serpente là-bas,
    Ces rayons qui baignent tes rives,
    O lac, ne t’appartiennent pas !

    Ce n’est pas de tes flots qu’émane
    Ta clarté si douce...

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    O Dieu de mon berceau, sois le Dieu de ma tombe !
    (LAMARTINE, Hymne au Christ.)

    I

    O Christ, ta passion sera donc éternelle !
    L’homme à percer ton cœur s’exerce chaque jour ;
    Et l’affreux déicide, hélas ! se renouvelle
    Sans lasser nos fureurs, pas plus que ton amour.

    Toujours des voix en foule acclament ton...

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    Tous vos dieux sont les miens ; vous aimez ce que j'aime ;
    Nos espoirs sont pareils, notre doute est le même ;
    Où vous le signalez, je vois aussi le mal,
    Et nous marchons tous deux vers le même idéal.

    Dans l'océan divin cherchant les perles neuves
    Et les parcelles d'or dans le sable des fleuves,
    Au fond des grandes eaux nous plongeons de concert ;...

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    Premier-né de la terre, hôte des bois antiques,
    Où l'aigle parle avec les chênes prophétiques ;
    Toi qu'entre ses lions et ses sphinx aux grands yeux
    Cybèle a de son lait nourri sur les hauts lieux,
    O poète ! ô géant à l'étroit dans les villes,
    Coursier impatient des entraves civiles,
    Contre l'homme et ses dieux ta vie est un combat,
    Et l'...