Louise Labé

  • Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;
    J'ai chaud extrême en endurant froidure :
    La vie m'est et trop molle et trop dure.
    J'ai grands ennuis entremêlés de joie.

    Tout à un coup je ris et je larmoie,
    Et en plaisir maint grief tourment j'endure ;
    Mon bien s'...

  • Las ! cettui jour, pourquoi l'ai-je dû voir,
    Puisque ses yeux allaient ardre mon âme ?
    Doncques, Amour, faut-il que par ta flamme
    Soit transmué notre heur en désespoir !

    Si on savait d'aventure prévoir
    Ce que vient lors, plaints, poinctures et blâmes ;
    Si...

  • On voit mourir toute chose animée,
    Lors que du corps l'âme subtile part.
    Je suis le corps, toi la meilleure part :
    Où es-tu donc, ô âme bien-aimée ?

    Ne me laissez par si long temps pâmée,
    Pour me sauver après viendrais trop tard.
    Las ! ne mets point ton corps...

  • Je fuis la ville, et temples, et tous lieux
    Esquels, prenant plaisir à t'ouïr plaindre,
    Tu pus, et non sans force, me contraindre
    De te donner ce qu'estimais le mieux.

    Masques, tournois, jeux me sont ennuyeux,
    Et rien sans toi de beau ne me puis peindre ;
    Tant...

  • Diane étant en l'épaisseur d'un bois,
    Après avoir mainte bête assénée,
    Prenait le frais, de Nymphes couronnée.
    J'allais rêvant, comme fais mainte fois,

    Sans y penser, quand j'ouïs une voix
    Qui m'appela, disant : Nymphe étonnée,
    Que ne t'es-tu vers Diane...

  • Quand j'aperçois ton blond chef, couronné
    D'un laurier vert, faire un luth si bien plaindre
    Que tu pourrais à te suivre contraindre
    Arbres et rocs ; quand je te vois orné,

    Et, de vertus dix mille environné,
    Au chef d'honneur plus haut que nul atteindre,
    Et des...

  • D'un tel vouloir le serf point ne désire
    La liberté, ou son port le navire,
    Comme j'attends, hélas, de jour en jour,
    De toi, Ami, le gracieux retour.
    Là j'avais mis le but de ma douleur,
    Qui finirait quand j'aurais ce bonheur
    De te revoir ; mais de la longue attente...

  • Au temps qu'Amour, d'hommes et Dieux vainqueur,
    Faisait brûler de sa flamme mon coeur,
    En embrasant de sa cruelle rage
    Mon sang, mes os, mon esprit et courage,
    Encore lors je n'avais la puissance
    De lamenter ma peine et ma souffrance ;
    Encor Phébus, ami des lauriers...

  • Quand vous lirez, ô Dames Lyonnoises,
    Ces miens écrits pleins d'amoureuses noises,
    Quand mes regrets, ennuis, dépits et larmes
    M'orrez chanter en pitoyables carmes,
    Ne veuillez point condamner ma simplesse,
    Et jeune erreur de ma folle jeunesse,
    Si c'est erreur. Mais...

  • Las ! que me sert que si parfaitement
    Louas jadis et ma tresse dorée,
    Et de mes yeux la beauté comparée
    A deux Soleils, dont Amour finement

    Tira les traits causes de ton tourment ?
    Où êtes-vous, pleurs de peu de durée ?
    Et mort par qui devait être honorée...