Jean Richepin

  • Au temps où les buissons flambent de fleurs vermeilles,
    Quand déjà le bout noir de mes longues oreilles
    Se voyait par-dessus les seigles encor verts,
    Dont je broutais les brins en jouant au travers,
    Un jour que, fatigué, je dormais dans mon gîte,
    La petits Margot me...

  • M'a dit la pluie : Écoute
    Ce que chante ma goutte,
    Ma goutte au chant perlé.
    Et la goutte qui chante
    M'a dis ce chant perlé :
    Je ne suis pas méchante,
    Je fais mûrir le blé.

    Ne sois pas triste mine
    J'en veux à la famine.
    Si tu tiens à ta...

  • Les aiguilles des vents froids
    Prennent les nez et les doigts
    Pour pelote.
    Quel est sur le trottoir blanc
    Cet être noir et tremblant
    Qui sanglote ?

    La pauvre enfant ! Regardez.
    La toux, par coups saccadés,
    La secoue,
    Et la bise qui la...

  • L'hiver vient de tousser son dernier coup de rhume
    Et fuit, emmitouflé dans sa ouate de brume.
    On ne reverra plus, avant qu'il soit longtemps,
    Sur la vitre, allumée en prismes éclatants,
    Fleurir la fleur du givre aux étoiles d'aiguilles.
    Voici qu'un frisson monte à...

  • Un mois s'ensauve, un autre arrive.
    Le temps court comme un lévrier.
    Déjà le roux genévrier
    A grisé la première grive.
    Bon soleil, laissez-vous prier,
    Faites l'aumône !
    Donnez pour un sou de rayons.
    Faites l'aumône
    A deux pauvres vieux papillons....

  • Autrefois elle était fière, la belle Ida.
    De sa gorge de lune et de son teint de rose.
    Ce gongoriste fou, le marquis de Monrose,
    Surnommait ses cheveux les jardins d'Armida.

    Mais le corbeau du temps de son bec la rida.
    N'importe ! Elle sourit à sou miroir morose...

  • On n'a pas vu le ciel aujourd'hui. Gris, opaque,
    Et très bas, le brouillard est resté suspendu.
    Les regards se brisaient au froid de cette plaque,
    Métal terni que nul rayon d'or n'a fendu.

    Vers le soir seulement, au bord du lourd couvercle
    Une lueur, ainsi qu'...

  • Dans l'âtre flamboyant le feu siffle et détone,
    Et le vieux bois gémit d'une voix monotone.

    Il dit qu'il était né pour vivre dans l'air pur,
    Pour se nourrir de terre et s'abreuver d'azur,
    Pour grandir lentement et pousser chaque année
    Plus haut, toujours plus...

  • L'amour que je sens, l'amour qui me cuit,
    Ce n'est pas l'amour chaste et platonique,
    Sorbet à la neige avec un biscuit ;
    C'est l'amour de chair, c'est un plat tonique.

    Ce n'est pas l'amour des blondins pâlots
    Dont le rêve flotte au ciel des estampes.
    C'est l'...

  • Toujours tout droit, sans rien regarder, ils cheminent.
    Les paysans hargneux de coin les examinent,
    Et les enfants poltrons se mettent sur un rang
    Pour les voir. Car ces gueux n'ont pas l'air rassurant.
    Et pourtant ils ne sont que trois, ces trouble-fête,
    Et le plus...