V
On croyait dans ces temps où le pâtre nocturne,
Loin dans lâair, au-dessus de son front taciturne,
Voyait parfois, témoin par lâombre recouvert,
Dans un noir tourbillon de tonnerre et de pluie,
Passer rapidement la figure éblouie
Dâun prophète emporté par lâEsprit au désert !
On croyait dans les jours du barde et du trouvère !
Quand tout un monde armé se ruait au Calvaire,
Pour délivrer la croix,
Et pour voir le lac sombre où Jésus sauva Pierre,
LâHoreb et le Cédron, et les portes de pierre
Du sépulcre des rois !
On croyait dans ce siècle où tout était prière ;
Où Louis, au moment de ravir La Vallière,
Sâarrêtait éperdu devant un crucifix ;
Où lâautel rayonnait près du trône prospère ;
Où, quand le roi disait : Dieu seul est grand, mon père ?
Lâévêque répondait : Dieu seul est grand, mon fils !
Les pâtres maintenant dorment dans les ravines ;
Jérusalem est turque ; et les moissons divines
Nâont plus de moissonneur ;
La royauté décline et le peuple se lève.
â Hélas ! lâhomme aujourdâhui ne croit plus, mais il rêve. â
Lequel vaut mieux, Seigneur ?